L’image du mois de décembre 2011 : la Nébuleuse de l’Haltère ou Dumbbell

Pour ce mois de décembre 2011, incursion dans le ciel profond avec cette belle image “en fausses couleurs” de la Nébuleuse de l’Haltère (ou Dumbbell = haltère en anglais, ou Messier 27) réalisée conjointement par Jean Pierre Debet pour la prise de vue et Christophe Mercier pour le traitement numérique. Elle a été enregistrée en novembre 2011 à Saint Léonard de Noblat (87400) avec une caméra Atik 16 HR placée au foyer d’un télescope Célestron 9 autoguidé et muni d’un réducteur ramenant la distance focale à 1567 mm et l’ouverture à F/6,3.
Cliquer sur l’image pour l’obtenir en haute résolution.
M27hrTechnique de prise de vue et de traitement numérique :
La technique en fausses couleurs employée ici est dénommée  “technique SHO”, pour les initiales du Soufre, de l’Hydrogène et de l’Oxygène.
Décrite pour la 1ère fois dans cette rubrique, elle mérite quelques explications : trois filtres particuliers sont utilisés pour réaliser trois séries d’images qui viendront remplir les couches des trois couleurs de base qui sont habituellement le rouge, le vert et le bleu. On dit que cette technique donne des images en fausses couleurs parce qu’ici, deux des filtres transmettent des bandes colorées dans l’infra-rouge non visible à l’œil nu…. Sur l’image finale, elles sont traduites par des couleurs visibles à l’œil choisies arbitrairement par l’opérateur.
– Une 1ère série d’images a été obtenue avec 10 poses de 10 minutes à travers un 1er filtre nommé “SII” (ou Soufre 2 pour Soufre ionisé 1 fois) qui laisse passer une bande colorée étroite de 13 nm centrée autour de la longueur d’onde de 672 mm (infra-rouge non visible à l’œil). Leur cumul conduit à l’image notée “SII” du montage photographique (cliquable) ci-dessous :
M27hr– Une 2ème série d’images est constituée de 13 poses de 10 minutes prises à travers un 2ème filtre appelé “Halpha” (raie alpha de la série de Balmer de l’Hydrogène) qui transmet une bande colorée étroite 13 nm autour de la longueur d’onde de 656 nm peu visible à l’œil. Cette série conduit à l’image notée “HA”.
– Quant à la 3ème, elle contient 15 poses de 10 minutes à travers un 3ème filtre appelé OIII (Oxygène 3 pour Oxygène ionisé 2 fois) transparent dans une bande de 8 nm autour de la longueur d’onde 501 nm correspondant au bleu-vert. Les 15 poses cumulées donnent l’image “OIII”.
Ces trois séries de photos conduisent à un temps de pose global de 380 minutes, soit 6 heures et 20 minutes (réparties sur 2 nuits).
Le traitement numérique de ces images réalisé par Christophe Mercier, fait appel au logiciel Iris pour l’empilement des 3 séries d’images selon la méthode “LRVB” (Luminance, Rouge, Vert, Bleu) , puis à Photoshop pour le rendu colorimétrique.

L’image finale n’a pas été obtenue par le traitement “SHO classique” avec les images Soufre (SII) pour la couche rouge, les images Hydrogène (Ha) pour la couche verte et les images Oxygène (OIII) pour la couche bleue. Cette combinaison donne une dominante verdâtre jugée peu esthétique par de nombreux amateurs. La combinaison choisie par Christophe est la suivante : couche rouge  = 50% Halpha + 50% SII ; couche verte = 75% OIII + 25% SII ; couche bleue = 85% OIII + 15% Halpha ; couche luminance = 100% Halpha. Elle donne une nébuleuse et des extensions caractérisées par une dominante bleue (image finale en bas à droite).

Caractéristiques physiques de Dumbbell :
Cette nébuleuse planétaire est la première à être découverte par l’astronome français Charles Messier le 12 juillet 1764. Son nom “Dumb-bell”, mot anglais signifiant “haltère”, lui a été donné en 1828 par l’astronome britannique John Herschel qui la comparait à “un boulet à deux têtes”. Il faudra attendre 1866 pour que la présence de gaz ionisé soit révélée par l’astronome britannique William Huggins au moyen d’un spectroscope.
Comme toute nébuleuse planétaire, M 27 est constituée d’un nuage de gaz entourant un noyau d’étoile : une “naine blanche” située en son centre. Elle résulte de l’expulsion de la matière des couches externes de l’étoile, à l’occasion de la mort de cette dernière. La température superficielle de l’étoile centrale atteint 85 000° K. Cette température est l’une des plus importantes connues à ce jour, mais reste normale pour une naine blanche.

Quand une petite étoile (moins de huit masses solaires) a fini de consommer tout son hydrogène, puis son hélium, son cœur s’effondre pour former une naine blanche, tandis que les couches externes sont expulsées sous forme de gaz par la pression de radiation.
Celles-ci forment alors un nuage de matière qui s’étend à grande vitesse et qui s’ionise sous l’action des photons ultraviolets émis par l’étoile centrale. Le nuage de gaz est très lumineux (sa magnitude apparente est ici de 7,4), car la grande quantité d’énergie apportée par les photons UV de la naine blanche (que l’on distingue nettement sur la photo en haute résolution malgré une magnitude apparente de 13,5) est réémise sous forme de rayonnements lumineux visibles et infrarouges.
Dans la plupart des nébuleuses, la majeure partie de cette lumière visible se situe dans le vert à la longueur d’onde 501 nm, celle qui correspond à la raie d’émission de l’Oxygène ionisé deux fois, et qu’on choisit justement comme longueur d’onde centrale de la bande transmission du filtre OIII. C’est aussi pour cette raison que les nébuleuses présentent souvent une dominante verte sur les photos “classiques” prises sans aucun filtre.

Comme on le constate, les nébuleuses planétaires n’ont en fait aucun rapport avec les planètes. L’adjectif “planétaire” a une origine purement historique. Observées en basse résolution, les nébuleuses sont apparues aux premiers astronomes comme des disques d’aspect “nébuleux” ressemblant quelque peu aux planètes. En raison de cette ressemblance, ils leur ont attribué ce qualificatif. Malgré son inexactitude, il est ensuite resté dans l’usage courant.

La nébuleuse Dumbbell est située à environ 1 200 années-lumière de nous dans la constellation du Petit Renard, constellation d’été entre le Cygne et la Flèche. Elle est facile à trouver quand on sait que son ascension droite (19h 59min 36 sec) coïncide avec celle de l’étoile rouge g de la pointe de la Flèche. Il suffit alors de pointer sur cette étoile et de remonter légèrement en déclinaison (+22° 43′ 16,1”) pour voir apparaître la nébuleuse M 27 dans le champ de l’oculaire. Ses dimensions angulaires apparentes sont de 8 X 5 secondes d’arc.

Bonnes observations.

Webographie :
http://www.astropolis.fr/catalogue-Messier/articles/M27/astronomie-messier-M27.html
http://fr.wikipedia.org/wiki/N%C3%A9buleuse_de_l%27Halt%C3%A8re

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