L’image du mois d’avril 2015 : les Pléiades

PleiadeshrPour le mois d’avril 2015, voici une image que tous les astronomes amateurs connaissent bien : l’amas ouvert des Pléiades, dans la constellation du Taureau, répertorié en mars 1769 par Charles Messier dans son catalogue sous le numéro 45.
Ce magnifique amas, facilement observable depuis notre hémisphère nord durant les mois d’hiver, est connu depuis les temps les plus reculés. Homère (l’Iliade, l’Odyssée), Hésiode, autour de 700 avant notre ère, le signalaient déjà !
Au moins 7 étoiles sont visibles à l’œil nu, nombre pouvant atteindre 9 par conditions moyennes et dépasser la douzaine lorsque le ciel est clair et bien noir. Kepler (1600), en compte jusqu’à 14 !
Les méthodes modernes d’observation ont révélé qu’au moins 500 étoiles, la plupart faibles, appartiennent à l’amas des Pléiades, réparties sur un champ angulaire de 2 degrés, soit quatre fois le diamètre de la Lune. La concentration est donc plutôt faible comparée à celle des autres amas ouverts.
Cette image a été réalisée en février 2015 depuis les environs de Limoges par Michel Vampouille et Francis Petitcoulaud, avec un APN Canon EOS 40 D muni d’un ensemble [téléobjectif Canon 300 mm  + extender x 1.4 produisant une focale de 420 mm et un nombre d’ouverture de 5.6). Le temps de pose global de 30 minutes résulte de l’empilement sous Pixinsight de 40 photos de 45 secondes enregistrées avec une sensibilité de 800 ISO.
Cliquer sur l’image pour l’observer en résolution supérieure.

Un peu de mythologie autour des Pléiades
Dans la mythologie grecque, les Pléiades sont sept sœurs : Alcyone (mag = 2.86), Electre (3.7), Maïa (3,86), Mérope (4.17), Taygète (4.29), Célanoé (ou Sélène, 5.44) et Astérope (étoile double : 5.64 et 6.41), filles du Titan Atlas (3.62) et de l’Océanide Pléione (5,09), d’où le nom « Les 7 Soeurs » donné parfois à cet amas. La position de ces 9 étoiles est repérée sur la photo ci dessous.

PleiadesetoilesannoteesLeur présence dans le ciel est expliquée par plusieurs versions :
– Le guerrier Orion, attiré par leur grande beauté, les pourchassa. Pour les sauver, Zeus les transforma en colombes. A leur mort, elles furent placées dans le ciel pour former l’astérisme des Pléiades. À sa mort, Orion fut aussi représenté dans le ciel, poursuivant les sept sœurs.
– Dans une autre version, elles se suicidèrent après la mort de leurs sœurs : les Hyades.
– Selon une autre, Zeus les aurait changées en colombes pour les soulager de leur chagrin, car elles étaient inconsolables du châtiment de leur père Atlas, condamné par Zeus à porter la voûte céleste sur ses épaules pour toute l’éternité.

Astérisme ou amas ouvert ?
– Les Pléiades forment-elles un astérisme avec des étoiles indépendantes ou un amas ouvert avec des étoiles liées entre elles ? La réponse a nécessité du temps pour apparaître clairement.
En 1767, le Révérend John Michell, physicien, astronome et géologue britannique, utilisa les Pléiades pour calculer la probabilité de trouver, n’importe où dans le ciel, par le hasard des alignements, des étoiles disposées de telle sorte qu’elles formeraient un groupe apparent. Il aboutit à une chance sur 496 000. Une simple observation nocturne lui dévoila que de tels groupes existaient en plus grand nombre que celui obtenu par son calcul. Il en déduisit très justement que les amas qu’on voyait dans le ciel étaient des groupes physiques.
– Charles Messier entra (sans justification) les Pléiades sous le N° 45 dans sa première liste des nébuleuses et amas d’étoiles, publiée en 1771.
– Aux environs de 1846, l’astronome allemand Mädler (installé en Estonie)  remarqua que les étoiles des Pléiades n’ont pas de mouvement propre mesurable les unes par rapport aux autres. Il en conclut hâtivement qu’elles constituaient la partie centrale fixe d’un système stellaire plus vaste, avec l’étoile Alcyone au centre. Cette conclusion fut rejetée par d’autres astronomes dont en particulier Friedrich Georg Wilhelm Struve (Estonie, 1793-1864). Mais le mouvement propre commun aux étoiles des Pléiades prouvaient qu’elles se déplaçaient en groupe dans l’espace. Cette remarque constitua un indice supplémentaire pour les considérer comme un amas physique à faible concentration d’étoiles.

L’amas est situé dans la constellation du Taureau, à proximité de l’axe dessiné par Sirius, le Baudrier d’Orion, et Aldébaran.
En plus d’être un bel objet, c’est aussi un excellent test d’acuité visuelle ! On distingue rapidement 5 étoiles, puis, au fur et à mesure que l’œil s’accommode, d’autres étoiles apparaissent. Ainsi, jusqu’à 10-11 étoiles sont visibles si les conditions météo sont bonnes.
Avec des jumelles, on verra plus d’étoiles qui se détachent comme des diamants dans le fond du ciel. C’est de cette manière que l’amas donnera plus de satisfaction. Avec des lunettes ou des télescopes, seule une partie de l’amas sera visible. Les nuages de gaz bleu entourant les étoiles n’apparaissent qu’en photographie.

Observation des étoiles et des nébulosités
Les nébulosités de couleur bleutée qui commencent à apparaître sur la photo, sont caractéristiques des nébuleuses par réflexion, réfléchissant la lumière des étoiles brillantes situées près d’elles, ou à l’intérieur.
La plus brillante de ces nébuleuses se trouve autour de l’étoile Mérope. Elle a été découverte visuellement en 1859 par Wilhelm Tempel à Venise avec une lunette de 4 pouces (10 cm). John Herschel, dans son New General Catalogue (NGC) paru en 1864, l’inscrit sous le numéro 1435 en la décrivant comme une très faible nébuleuse de la taille de la Pleine Lune (diamètre angulaire de 30′ environ). Elle est aussi connue sous le nom de « Nébuleuse de Mérope » ou de « Tempel’s Nebula ». Sa magnitude apparente se situe autour de 13. L’extension à Maïa a été trouvée en 1875 (NGC1432 ou Nébuleuse de Maïa), et les nébuleuses entourant Alcyone, Electra, Célaéno et Taygète en 1880.

PleiadesNGCICannoteeLa grande complexité des nébuleuses des Pléiades n’a été véritablement révélée qu’avec l’apparition des premiers appareils de photographie astronomique, c’est à dire ceux des frères Henry à Paris et Isaac Roberts en Angleterre, entre 1885 et 1888. En 1890, E.E. Barnard découvrit une concentration d’apparence stellaire de matière nébuleuse très proche de Mérope, qui la fit admettre dans Index Catalogue of Nebulae (ou catalogue IC), publié pour la 1ère fois en 1895, sous la référence IC 349. La nature de nébuleuse par réflexion fut prouvée en 1912 par Vesto M. Slipher qui montra que leur spectre était la copie exacte de celui des étoiles qui les éclairent. IC 349 est contenue dans NGC 1435.
Il a été prouvé que l’ensemble des nébuleuses (appelé parfois « Nébuleuse des Sept Soeurs) n’est pas un reste du nuage de poussières dans laquelle l’amas des etoiles s’est formé. En effet, la nébuleuse et l’amas n’ont pas la même vitesse apparente (leurs deux vitesses radiales diffèrent de 11 km/s), ce qui laisse supposer que la Nébuleuse aurait croisé tout à fait par hasard la route de l’amas d’étoiles (qui elles, ont toutes la même vitesse).

Le spectaculaire amas des Pléiades est surtout connu pour la couleur bleutée de ses étoiles (et de ses nébulosités). Cette couleur indique qu’on est en présence d’étoiles jeunes très chaudes possédant toutes un profil spectral de type B, c’est à dire avec des températures de surface comprises entre 15 et 25 000°K. Bien évidemment, cette couleur se retrouve dans les nébulosités.
Les étoiles les plus brillantes sont en rotation rapide, avec des vitesses de 150 à 300 km/sec à leur surface, ce qui est courant pour des astres de la séquence principale de type B. Cette rotation peut être détectée par les amateurs au moyen de la mesure des raies spectrales d’absorption et d’émission qui sont élargies par effet Doppler (un côté de la surface stellaire s’approche de nous, alors que celle du côté opposé s’en éloigne, relativement à la vitesse radiale moyenne de l’étoile). L’exemple le plus marquant d’une étoile en rotation rapide dans cet amas est Pléione. Ce sera une de nos cibles durant les observations spectroscopiques de l’été prochain.

La distance de l’amas des Pléiades à la Terre pose encore des problèmes. La mesure directe par la méthode de la parallaxe au moyen du satellite Hipparcos a donné 380 années-lumière. Cependant, des mesures ultérieures de parallaxe faites par le télescope spatial Hubble et par les observatoires du Mont Palomar et du Mont Wilson ont finalement placé cet amas à une distance de 440 ± 6 années-lumière. La sonde Gaïa viendra peut-être confirmer l’une ou l’autre de ces valeurs.

Selon les derniers résultats publiés en 1993, l’âge de l’amas des Pléiades serait de 100 millions d’années. Il a été calculé que les Pléiades, en tant qu’amas d’étoiles à faible densité, ont une espérance de vie de seulement 250 autres millions d’années, les forces de gravitation étant insuffisantes pour maintenir leur cohésion ; à ce moment les étoiles se seront éparpillées et suivront leurs orbites comme des astres isolés ou multiples.

La présence de quelques étoiles « Naines Blanches » a été signalée dans les Pléiades. Ces étoiles soulèvent un problème spécifique d’évolution stellaire : comment des Naines Blanches, à qui il faut des milliards d’années pour arriver à ce stade final, peuvent-elles exister dans un amas aussi jeune ? Comme il n’y en a pas qu’une, il est certain qu’elles sont d’authentiques membres de l’amas et non pas des étoiles capturées dans le champ stellaire, par ailleurs très ténu. L’explication retenue semble être que ces étoiles étaient massives à l’origine, de sorte qu’elles ont évolué rapidement. Mais pour une raison quelconque : violents vents stellaires, transfert de masse à de proches voisines, rotation rapide…, elles ont perdu rapidement la plus grande partie de leur masse, sans doute transformée en nébuleuse planétaire. Ce qui reste alors de l’étoile, et qui auparavant était son noyau, est devenu une Naine Blanche stable, état dans lequel on la voit aujourd’hui.
Dans une Naine Blanche, les forces de gravitation sont compensées, non plus par celles provenant de la fusion thermonucléaire (l’étoile ayant épuisé tout son combustible), mais par la pression qu’exercent les électrons qui refusent de se comprimer à l’infini. Le cœur de l’étoile se contracte, les électrons se plaquent les uns contre les autres, mais jusqu’à une certaine limite. Au-delà, ils exercent une pression vers l’extérieur appelée « pression de dégénérescence des électrons ». Celle-ci s’oppose à la gravité et l’effondrement est stoppé. Le cœur effondré devient stable : c’est une naine blanche.

Depuis 1995, de nouvelles observations ont révélé plusieurs étoiles candidates au titre de « Naines Brunes » (telle Teide 1). Ces étoiles possèdent une masse intermédiaire entre celle des planètes géantes (comme Jupiter) et celle de petites étoiles ayant une masse d’au moins 6 à 7% de celle du Soleil, soit 60 à 70 fois celle de Jupiter. En d’autres termes, il s’agit d’un objet insuffisamment massif pour être considéré comme une étoile mais plus massif qu’une planète géante. C’est en quelque sorte une étoile avortée qui se refroidit lentement. La chaleur émise par une naine brune provient uniquement de sa contraction gravitationnelle.
Elles sont classées en différents types spectraux selon leur température de surface qui est comprise entre 2 800°K pour les plus chaudes (type M : naine rouge) et 500°K pour les plus froides (type Y). Elles rayonnent principalement dans le domaine infrarouge.

Observation contemplative des Pléiades :
Comme les Pléiades sont situées à 4 degrés seulement de l’écliptique, leur occultation par la Lune se produit assez souvent : c’est toujours un spectacle captivant, même pour des amateurs chevronnés. A cette occasion, on peut surveiller la nuit où la Lune vient s’inscrire dans le quadrilatère formé par Alcyone, Electra, Mérope et Taygète. Les planètes, comme Vénus, Mars et Mercure, peuvent également se rapprocher, voire traverser l’amas des Pléiades et offrir alors un spectacle de choix…

Webographie :

http://messier.obspm.fr/f/m045.html
http://fr.wikipedia.org/wiki/Pl%C3%A9iades_%28astronomie%29
http://www.jmmasuy.net/grands_noms/noms_1_chandra.html
http://fr.wikipedia.org/wiki/Naine_brune
http://fr.wikipedia.org/wiki/Teide_1

Rédaction : Michel Vampouille

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