L’image du mois de mars 2016 : la constellation d’Orion

Pour le mois de mars 2016, nous vous proposons la photographie « classique » de la constellation d’Orion, une image réalisable avec un minimum de matériel, à savoir un appareil photographique numérique (APN) réflex ou bridge muni d’un objectif grand angulaire, monté, soit sur un pied motorisé permettant de faire des poses longues, soit sur un pied fixe classique, entraînant alors la prise d’un plus grand nombre de photos.
Constellation d'OrionCliquer sur l’image pour l’observer en résolution supérieure.
Cette photo a été réalisée par Michel Tharaud, à son domicile, aux Allois, dans la banlieue est de Limoges avec un APN Canon EOS 20D équipé d’un téléobjectif réglé à 18 mm, monté sur une monture Ioptron « Sky Tracker » [1] assurant le suivi. Le temps de pose global est de 18 minutes, correspondant au cumul de 9 enregistrements de 2 minutes sous une sensibilité de 800 ISO et une ouverture de F/10 . Le traitement numérique a été effectué avec le logiciel Pixinsight lors de l’atelier astrophoto du mois de février.
Avec un pied classique sans suivi, il faudrait faire une centaine de poses d’une dizaine de secondes pour parvenir à un résultat équivalent : voir à ce sujet l’article « Puis-je photographier ces étoiles avec mon appareil sur un pied non motorisé [2] ».

Forme de la Constellation [3] :
Avec autant d’étoiles brillantes facilement visibles et reconnaissables à l’œil nu, Orion est la constellation emblématique de l’hiver dans l’hémisphère nord. Ses sept étoiles les plus brillantes forment un nœud papillon quand on la voit dans le sens horizontal et un sablier quand elle est orientée verticalement comme ici. Quatre étoiles très brillantes forment un trapèze caractéristique au milieu duquel se trouve un alignement de trois autres étoiles, le « Baudrier » ou les « Rois Mages », qui constituent une signature remarquable impossible à manquer.

Orion Mythologie

Mythologie [3] :
Orion est peut-être la constellation la plus ancienne : de nombreuses civilisations l’ont repérée et représentée avec des formes différentes de notre vision actuelle :

Vers -2500 avant notre ère, les Sumériens (habitants de l’actuel Irak) y voyaient un mouton.

Les Égyptiens la considéraient comme une offrande à Osiris, dieu de la Mort et de l’outre-monde.

En Chine, Orion est l’une des vingt-huit figures du zodiaque chinois traditionnel ; elle est connue sous le nom de « Shen », ce qui signifie littéralement « trois », peut-être en référence aux trois étoiles du Baudrier.

En Grèce, Orion était mentionnée sous cette dénomination dans l’Odyssée d’Homère, les Odes d’Horace, les Phénomènes d’Aratus de Soles et l’Enéide de Virgile.
Elle était bien entendu répertoriée parmi les quarante-huit constellations de l’Almageste [4] (la somme des connaissances mathématiques et astronomiques les plus avancées de l’Antiquité) de Ptolémée.

Orion est aussi citée dans la Bible, dans les livres de Job (9.9) (38.31-32) et d’Amos (5.8).

Pour la mythologie grecque, elle représente le chasseur légendaire Orion qui se vantait de pouvoir tuer n’importe quel animal. Dans certaines versions de la légende, il fut tué par le Scorpion, qui a été placé à l’opposé de la voûte céleste par les dieux afin qu’on ne les voit jamais en même temps au-dessus de l’horizon. Dans une autre version, on raconte que Orion s’éprit des Pléiades, les 7 filles d’Atlas. Fuyant la force du chasseur, elles furent changées en colombes par le puissant Zeus. Cela n’a pas suffi… Elles sont maintenant placées dans le ciel à un endroit où Zeus continue à les défendre sous l’apparence du Taureau [5].

Principales étoiles de la Constellation [3] :
Sous nos latitudes, Orion apparaît en position horizontale au dessus de l’horizon Est en octobre pour disparaître en position verticale vers l’Ouest en mars. Sa silhouette très reconnaissable la fait tout de suite repérer.
Orion 4 recoupée annotéeOrion contient 2 étoiles super-géantes :
Bételgeuse [6] (ou α Orionis), à l’épaule droite d’Orion, est une supergéante rouge (donc « froide ») reconnaissable sur la photo par sa couleur jaune orangé. Sa magnitude apparente varie légèrement de 0 à 1,3 sur une période de 5,7 années. 100 000 fois plus brillante que le Soleil, 950 fois plus grande, 22 fois plus massive, elle s’étendrait au-delà de l’orbite de Jupiter si elle était située à sa place ; Bételgeuse est l’une des étoiles les plus grandes que l’on connaisse et, malgré sa distance (environ 640 années-lumière), elle est la seule avec la Soleil dont le disque a été résolu spatialement par le télescope spatial Hubble avant l’avènement des techniques d’interférométrie [7]. Par conséquent, sa chromosphère est elle-même immense et s’étendrait, selon les dernières études, sur 150 unités astronomiques (à titre de comparaison, Pluton ne s’éloigne jamais à plus de 50 ua du Soleil).
Avec un âge de seulement quelques millions d’années et dotée d’une taille énorme, Bételgeuse est vouée à exploser en une supernova qui sera facilement visible depuis la Terre même en plein jour, d’ici à quelques milliers d’années. Suite à son explosion, elle sera réduite à un diamètre d’une vingtaine de kilomètres et deviendra une étoile à neutrons.

Rigel [8] (ou β Orionis), à la cheville gauche d’Orion, est aussi une supergéante, mais bleue cette fois (donc chaude), ainsi que le révèle la photo. Grande comme 80 Soleils et 40 000 fois plus lumineuse, elle atteint une magnitude absolue de -6,7. C’est l’une des étoiles les plus lumineuses que l’on connaisse.
Si elle prenait la place de Sirius qui n’est qu’à 9 al de nous, nos nuits seraient autant éclairées qu’avec une Lune en premier quartier. Située à 770 al, sa magnitude apparente de 0,18 la classe à la 6ème place des étoiles les plus brillantes [5]. Comme Bételgeuse, Rigel est une étoile mourante,  probablement en train de fusionner l’hélium en carbone et oxygène.
Elle évolue dans une région riche en nébuleuses et éclaire plusieurs nuages de poussière, comme la Nébuleuse de la Tête de Sorcière (IC 2118) qu’il serait intéressant de photographier.

Trois autres étoiles remarquables [5] de cette constellation sont celles du Baudrier : Alnitak (ζ Orionis), Alnilam (ε Orionis) et Mintaka (δ Orionis). Alnitak, qui jouxte la célèbre nébuleuse de la Tête de Cheval, est une étoile triple dominée par une géante bleue très chaude dont la température en surface dépasse 30 000°. L’étoile centrale, Alnilam, la plus lumineuse de la « Ceinture » est aussi une étoile bleue très chaude, très proche de son déclin. La dernière, Mintaka, la moins brillante, est en fait un système complexe de 5 étoiles. On peut en distinguer au moins une avec un télescope.

Dans la pointe du poignard d’Orion, on trouve facilement la célèbre Nébuleuse d’Orion ou Messier 42, une cible privilégiée pour tous tous les astronomes amateurs, débutants ou confirmés. Celle-ci a déjà fait l’objet d’un article dans cette rubrique [9]. Nous n’y reviendrons pas.
Il faut aussi signaler l’étoile Hatsya ou ι Ori (iota Ori) [10] qui est une étoile « en fuite ». Selon une théorie, Hatsya faisait partie d’une paire d’étoiles binaires étroitement soudées. Dans une collision entre les deux binaires remontant à environ 2,7 millions d’années, deux des quatre étoiles ont été éjectées, tandis que les deux autres (la paire Iota Ori O et B) est restée plus ou moins sur le site de l’évènement. La collision des vents stellaires de cette paire fait de cette région une source importante de rayons X [11].

Le bras gauche d’Orion semble tenir un arc dont l’étoile la plus brillante est Tabit. Conformément à la légende grecque, il s’agit plutôt de la dépouille d’un animal sauvage qu’il a chassé [5].

Alignements lointains :
Remarquable entre toutes, Orion peut servir de guide pour retrouver la position de nombreuses  étoiles remarquables caractéristiques des constellations auxquelles elles appartiennent.

Hexagone d'hiver Stellarium3

En prolongeant au sud-ouest la ligne des étoiles du Baudrier, on trouve Sirius (α Canis Majoris) dans la gueule du Grand Chien. Cette étoile blanche, très proche de la Terre (8,6 al) est la plus lumineuse du ciel d’hiver avec une magnitude apparente de -1,46. Du fait de sa proximité avec la Terre et le Soleil, elle a servi à plusieurs découvertes, notamment la mise en évidence du mouvement propre des étoiles (1,34 seconde d’arc par an), la mesure de sa vitesse radiale (-7,6 km/s), la présence à ses côtés Sirius B, la première naine blanche à avoir été observée (en 1862 par A. G. Clark) [12].

En prolongeant cette même ligne vers le nord-est cette fois, on rencontre Aldébaran (α Tauri), l’étoile la plus brillante de la constellation zodiacale du Taureau. A l’observation, Aldébaran semble être le membre le plus brillant d’un groupe d’étoiles assez étalé : l’amas des Hyades (l’amas le plus proche de la Terre), mais en fait cette étoile est située à mi-chemin entre la Terre et les Hyades et est donc indépendant de celui-ci. Aldébaran est reconnaissable à sa couleur orange, traduisant sa faible température de surface (3 400° K) et sa grande taille [13].

Regardons maintenant dans une direction perpendiculaire au Baudrier, selon une ligne reliant Rigel à Bételgeuse. On arrive dans la constellation zodiacale des Gémeaux, où les deux étoiles les plus brillantes, Castor (α Geminorum) et Pollux (β Geminorum)  ont été nommées ainsi d’après les jumeaux de la légende. Castor est une étoile géante blanche double, Pollux une géante orange retenant une exoplanète [14].

Continuons notre exploration selon une ligne reliant l’étoile centrale du Baudrier, Alnilam, à Meissam, la tête d’Orion. On tombe sur Capella (α Aurigae), l’étoile la plus brillante de la constellation du Cocher et la 3ème de l’hémisphère nord, après Sirius et Arcturus. Capella, souvent considérée comme une étoile simple est en fait un système stellaire composé de deux paires d’étoiles doubles : 2 étoiles brillantes géantes et 2 naines rouges [15].

Terminons avec une ligne joignant Bellatrix à Bételgeuse. On rencontre Procyon (α Canis Minoris), la plus brillante des 2 étoiles que compte la petite constellation du Petit Chien. Elle est classée comme une sous-géante jaune-blanc, ce qui signifie qu’elle vient de finir la fusion de son hydrogène dans sa région centrale et qu’elle commence à se dilater [16].

Toutes les étoiles qu’on vient de citer forment divers astérismes connus sous les noms :
– du Triangle d’Hiver, composé de Sirius, Bételgeuse et Procyon,
– de l’Hexagone d’Hiver, constitué par : Capella, Pollux, Procyon, Sirius, Rigel et Aldébaran,
– du Grand « G » de l’Hiver : comme ci-dessus, dans le même ordre, mais après Aldébaran, on termine par Bételgeuse.

Les constellations décrites ci-dessus représentent les « vedettes » du ciel d’hiver. Évidemment, il en existe bien d’autres mais elles sont peu observées à cause du manque d’étoiles brillantes en leur sein. Parmi celles-ci, plusieurs constituent de véritables défis pour l’oeil nu. Combien d’entre vous ont réussi à observer toutes les étoiles de l’Éridan jusqu’à l’horizon ? Ou encore, qui a observé la Licorne, le Lièvre,  ou les étoiles faibles du Grand Chien ?

A vos oculaires, et bonne chance….!

Webographie :

[1] http://www.optique-unterlinden.com/catalogue/produit/m/0/p/IO3302W
[2] http://saplimoges.fr/puis-je-photographier-…..-un-pied-non-motorise/
[3] https://fr.wikipedia.org/wiki/Orion_%28constellation%29
[4] https://fr.wikipedia.org/wiki/Almageste
[5] https://www.youtube.com/watch?v=f9P5SLP7zLc
[6] https://fr.wikipedia.org/wiki/B%C3%A9telgeuse
[7]
http://www.astrosurf.com/luxorion/orion2.htm
[8] https://fr.wikipedia.org/wiki/Rigel
[9] http://saplimoges.fr/limage-du-mois-de-mars-2014-la-grande-nebuleuse-dorion-m-42/
[10] http://www.daviddarling.info/encyclopedia/I/Iota_Orionis.html
[11] https://fr.wikipedia.org/wiki/Iota_Orionis
[12] https://fr.wikipedia.org/wiki/Sirius
[13] https://fr.wikipedia.org/wiki/Ald%C3%A9baran
[14] https://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%A9meaux
[15] https://fr.wikipedia.org/wiki/Capella_%28%C3%A9toile%29
[16] https://fr.wikipedia.org/wiki/Procyon

Rédaction : Michel Vampouille




L’image du mois de mars 2014 : la Grande Nébuleuse d’Orion M 42

Pendant les mois d’hiver, on peut observer, quand la météo est clémente, l’une des plus célèbres constellations du ciel : la Constellation d’Orion, et au centre de celle-ci : trois étoiles bleues quasiment équidistantes qui forment le Baudrier d’Orion, d’où descend la peau de lion abritant la non moins célèbre nébuleuse du même nom aussi appelée Messier 42 ou NGC 1976. C’est elle que nous vous proposons de (re)découvrir en ce début du mois de mars 2014.

L’image présentée, légèrement retaillée, a été réalisée par Michel Vampouille en janvier 2013 avec un APN Canon EOS 40 D réglé à 320 ISO et équipé d’un objectif Canon 200 mm ouvert à F/2,8. Elle résulte du cumul de 27 poses de 1 minute. Le traitement a été effectué avec le logiciel Pixinsight qui a su faire ressortir un grand nombre de nuances et de détails malgré un temps de pose relativement court pour ce genre d’objet.
Cliquer sur l’image pour l’observer en résolution supérieure.

M42ahr Cliquer sur l’image annotée pour l’observer en résolution supérieure

Histoire de sa découverte :
La nébuleuse d’Orion fut découverte à la fin de l’année 1610 par le français Nicolas Claude Fabri de Peiresc, apparemment le premier à remarquer son aspect nébuleux.
En 1611, Jean Baptiste Cysat, un jésuite astronome suisse refit les mêmes observations. Quelques années plus tard, en 1617, Galilée examina plus attentivement l’étoile principale θ1 (une des étoiles du groupe que l’on nomme maintenant le Trapèze, visible au centre de la nébuleuse), et découvrit avec un grossissement de 27/28 fois, qu’elle était triple, sans toutefois percevoir la nébuleuse.
Bien que Ptolémée, Tycho Brahe et Johann Bayer identifiaient les étoiles de son centre comme une seule grosse étoile et que Galilée ait détecté un certain nombre de petites étoiles avec sa lunette astronomique, il semble que toutes ces découvertes furent ignorées durant une cinquantaine d’années.
Finalement, Christian Huygens fut longtemps crédité de sa redécouverte en 1656, notamment par Edmond Halley, qui l’inclut dans sa « liste de six nébuleuses », ainsi que par Charles Messier qui l’ajouta à son fameux catalogue le 04 mars 1769.
Ce dernier détermina aussi la position de la petite partie au Nord-Est de la nébuleuse comme étant une nébuleuse séparée, et lui donna le numéro 43 (voir photo annotée). Cette nébuleuse en émission et réflexion ressemblant à une virgule est éclairée par NU Orionis (attention : ″N″ + ″U″ et non la lettre grecque ″nu″), une étoile variable située en son centre de magnitude moyenne 7.

Situation de M 42 dans la constellation et dans la Voie Lactée :
Malgré son caractère familier et sa proximité, cette nurserie stellaire n’est pas encore complètement documentée. Ce n’est, par exemple, qu’en 2007 que l’on a constaté qu’elle était plus proche de la Terre qu’on le pensait : 1.350 années-lumière au lieu de 1.500, soit deux fois plus que Rigel ou quatre fois plus que Bételgeuse.
Elle est très étendue. Avec un diamètre angulaire supérieur à 1 degré, elle couvre une surface égale à plus de quatre fois celle de la Pleine Lune.
C’est la région de ce genre la plus proche de notre Terre.

Grâce à la radioastronomie, nous avons pu localiser Messier 42 sur le bras extérieur d’Orion, un des nombreux bras spiralés de la Voie Lactée constitué d’étoiles et de nuages denses d’Hydrogène froid constitué de molécules bipolaires H2. Grâce aux émissions radioélectriques de l’hydrogène neutre (HI) à 21 cm de longueur d’onde, ainsi que celles des molécules de CO, nous connaissons maintenant le profil radioélectrique de toute la nébuleuse d’Orion et des alentours du Baudrier. Cette technique de pointe a permis de découvrir que l’étoile de type O6 du Trapèze s’était formée il y a quelque 300.000 ans à partir des nuages d’hydrogène tandis que les dizaines de nodules sombres, les proplydes, seraient en fait des systèmes proto-stellaires en gestation ou des proto-étoiles qui ne sont pas encore parvenues sur la Séquence Principale.

Description des nuages de gaz contenus dans M 42 :
La nature gazeuse de la Nébuleuse d’Orion a été révélée en 1865 par William Huggins au moyen de la spectroscopie En septembre 1880, M42 fut la première nébuleuse à être photographiée avec succès par Henry Draper.
Elle doit ses couleurs à la présence de plusieurs gaz interstellaires répartis aux alentours des étoiles centrales du Trapèze. Sous l’effet du rayonnement ultraviolet des étoiles jeunes, les atomes neutres d’Hydrogène, notés HI, sont irradiés et se transforment en ions Hydrogène, notés HII, (ion = atome ayant perdu un électron) et en électrons libres. Cet état n’est pas stable : les ions et les électrons libres se recombinent en émettant un spectre lumineux caractéristique de l’état d’excitation du gaz. C’est ce rayonnement en majorité rouge et gris bleu que l’on voit sur la photo.

M 42 est une nébuleuse à émission. Elle abrite en son sein une énorme bulle de gaz très ténu porté à une température de 2 millions de degrés. Cette température est tellement élevée que le gaz excité par les étoiles émet non pas dans le domaine visible, mais dans celui des rayons X, domaine d’investigation du satellite X-Ray Multi-Mirror (XMM), lancé par l’Agence Spatiale Européenne en 1999. Ce rayonnement n’est pas accessible aux amateurs.

Observation instrumentale de M 42 et des objets voisins :
Cette nébuleuse est bien connue de tous les astronomes amateurs C’est une nébuleuse diffuse et brillante qui peut, sous un ciel noir et sans lune, être vue à l’œil nu.
Avec une paire de jumelles 10 x 50 on peut voir que ce n’est pas qu’une étoile de 4ème magnitude mais plutôt une sorte de nuage brillant allongé.
Dans un télescope de 100 mm d’ouverture et à faible grossissement (50x), M42 est tellement vaste qu’elle déborde du champ oculaire. Elle apparaît comme un profil d’oiseau aux ailes déployées dont le corps central plus brillant est délimité dans sa partie nord par une échancrure sombre. Les ailes dont les pourtours s’évanouissent sur le fond du ciel s’incurvent vers le sud. Le corps central est la zone brillante qui apparaît légèrement verdâtre dans un télescope de 150 mm d’ouverture du fait de la faible sensibilité rétinienne aux faibles lumières.

Avec un peu d’attention, on distingue que la tête de l’oiseau, appelée M43, est légèrement séparée du corps par une bande de matière sombre bien visible ici. Dans la tête, on découvre une étoile de 10ème magnitude.
Dans la partie centrale la plus brillante se trouvent les étoiles du Trapèze (souvent surexposées) tandis que le complexe stellaire de θ2 Orionis se trouve près du bord Sud-Est de l’aile, un peu à l’écart de la zone brillante. La partie nord de M43 est traversée par une remarquable traînée sombre orientée est /ouest, qui la sépare du groupe des trois nébuleuses brillantes à émission/réflexion NGC 1973, 1975 et 1977 (voir photo annotée), subtilement coloré en gris-bleu. D’après Jason Ware, un membre de la ″Texas Astronomical Society″, les étoiles contenues dans ces nébuleuses ressemblent à un homme qui court et pour cette raison, on leur a donné le nom de ″Running Man″.
En bordure sud de M42 revenir à l’image en grand format), on trouve NGC 1980, une nébuleuse brillante par émission illuminée par trois étoiles doubles dont Iota Orionis, l’étoile la plus brillante de notre image, de magnitude 2.75.
Encore plus au sud, on peut noter NGC 1999, une nébuleuse par réflexion dont le gaz est excité par l’étoile variable V380.
Et pour terminer avec les objets étendus, tout au nord, NGC 1981, un jeune amas ouvert composé d’une dizaine d’étoiles brillantes toutes éloignées de 1300/1400 années-lumière.
La reconnaissance de tous ces objets a été faite au moyen des scripts ″Image Solver″ et ″AnnotateImage″ du logiciel Pixinsight. Nous en parlerons dans un prochain article.

Il y a quelques années, on découvrit près de M42 une dizaine d’astres peu lumineux, associés à un type d’étoiles nommées ″naines brunes″. Les naines brunes seraient des objets dont le diamètre se situe entre celui de Jupiter et du Soleil. Elles consisteraient en étoiles ratées qui émettent peu ou pas de lumière. La surprise a été d’en découvrir un aussi grand nombre dans un espace aussi restreint.

Une histoire à suivre…

Webographie :

http://messier.obspm.fr/f/m042.html
http://www.futura-sciences.com
http://www.astrosurf.com/luxorion/orion.htm
http://fr.wikipedia.org/wiki/Orion_%28constellation%29
http://www.astrosurf.com/luxorion/orion5.htm
http://www.webastro.net/index.php?wapedia=articles&article=184&PHPSESSID=4256ee315c27bd4d081ef7420be74aee

Rédaction : Fernanda Baudon et Michel Vampouille.




L’image du mois de mars 2011 : la Grande Nébuleuse d’Orion

Pour ce mois de mars 2011, nous restons dans le ciel profond avec cette photographie de la Grande Nébuleuse d’Orion (ou Messier 42, ou NGC 1976) située dans la constellation du même nom, cible privilégiée de tous les amateurs astronomes.
Cliquer sur l’image pour l’obtenir en haute résolution. 

Nébuleuse d'Orion M42Cette image a été réalisée par Daniel Debord et Jean Pierre Debet en décembre 2010 à Panazol (87 350) au cours d’un test d’autoguidage d’une lunette TMB 115-800, fixée sur une monture EQ6 et couplée à un APN Nikon D 300. Le test s’est révélé très positif, puisque des poses de 15 minutes ont été réalisées sans aucun défaut de suivi. Ici, ce sont 12 poses de 5 minutes (pour préserver le « noir » du ciel) qui ont été retenues et additionnées avec le logiciel IRIS, conduisant à un temps de pose global de 60 minutes. Le traitement a été poursuivi avec le logiciel Photoshop selon la technique LRVB (un calque Luminance + un autre [Rouge, Vert, Bleu]) décrite dans la leçon N°6 de Nicolas Outters et publiée dans la revue Astronomie Magazine de novembre 2008. Les étoiles sont rondes sans aucun défaut de suivi, les détails de la nébuleuse sont bien rendus sans surexposition centrale, l’amas du Trapèze d’Orion n’est pas résolu, mais se détache nettement sous la forme d’une tache blanche plus grosse qu’une étoile unique. On mesurera les progrès accomplis par l’équipe en comparant cette image à celle que nous avions déjà publiée dans l’image du mois d’avril 2009…

Avec une magnitude apparente moyenne de 4, M 42 est la nébuleuse diffuse la plus brillante du ciel boréal : en hiver, on peut la distinguer à l’oeil nu dans un ciel nocturne sans pollution lumineuse juste en dessous de la Ceinture (ou du Baudrier) d’Orion. Elle couvre une surface presque circulaire de diamètre angulaire égal à 1°20 min environ, équivalente à plus de quatre fois la Pleine Lune. Située à une distance de 1 350 années-lumière réévaluée à la baisse en 2007 (1 500 auparavant),  elle s’étend sur 33 années-lumière [1].
Elle fut découverte en 1610 par Nicolas-Claude Fabri de Peiresc [2] : un intellectuel de l’époque baroque, conseiller au parlement de Provence, scientifique, littéraire et astronome qui entreprit notamment de faire graver la première carte de la Lune à partir d’observations télescopiques réalisées depuis l’observatoire personnel qu’il avait construit sur le toit de sa maison. Elle est aussi le premier objet du ciel profond à avoir été photographié le 30 septembre 1880 par Henry Draper [3], un médecin américain, astronome amateur, pionnier de l’astrophotographie qui fut aussi le premier à photographier un spectre stellaire (Véga) et une comète. Aujourd’hui, les observations faites dans le domaine des Rayons-X par le satellite européen, XMM-Newton (X-Ray Multi-Mirror) lancé en 1999 par l’Agence Spatiale Européenne (ESA), permettent de mieux comprendre les explosions d’étoiles qui se produisent dans cette nébuleuse .
M 42 est la partie principale d’un nuage de gaz (hydrogène en rose, oxygène en vert) et de poussière (le Nuage d’Orion) qui s’étend sur presque la moitié de la constellation. Ce nuage renferme aussi la Boucle de Barnard et la nébuleuse de la Tête de Cheval. Grâce aux observations du satellite XMM-Newton, une équipe du Laboratoire d’Astrophysique de Grenoble a découvert que la Nébuleuse d’Orion abrite une énorme bulle de gaz très ténu (1 000 atomes/cm3 en moyenne) porté à une température de 2 millions de degrés émettant dans le domaine des rayons-X (arrêtés par l’atmosphère terrestre, les rayons-X ne peuvent être observés qu’à partir des satellites). Elle contient aussi de nombreuses étoiles jeunes ou en formation.
Le Trapèze d’Orion [4] [5] est un amas ouvert relativement jeune qui s’est formé à partir des nuages de la nébuleuse. Il est identifiable par l’astérisme en forme de trapèze (non résolu au centre de la photo) que constituent les quatre étoiles centrales les plus brillantes (des supergéantes bleues très chaudes de 15 à 30 diamètres solaires). Occupant un volume de 1,5 année-lumière de diamètre, elles sont responsables de la majeure partie de l’illumination de la nébuleuse environnante. Il se pourrait que le Trapèze fasse partie du plus vaste Amas de la Nébuleuse d’Orion : un groupe d’environ 2000 étoiles à l’intérieur d’une boule de 20 années-lumière de diamètre.

Si la réalisation de telles photos vous tente ou si la nature de tels objets célestes vous intrigue, n’hésitez pas à prendre contact avec notre association par mail : contact@saplimoges, ou par visite un samedi non férié entre 15 et 17H au 12 rue des Carriers, Limoges. Vous serez les bienvenu(e)s.

Bibliographie :
[1] : http://fr.wikipedia.org/wiki/Nébuleuse_d’Orion
[2] : http://fr.wikipedia.org/wiki/Nicolas-Claude_Fabri_de_Peiresc
[3] : http://fr.wikipedia.org/wiki/Henry_Draper
[4] : http://fr.wikipedia.org/wiki/Orion_(constellation)
[5] : http://www.cosmovisions.com/ori.htm

Rédaction : Michel Vampouille