L’image du mois d’octobre 2024 : test du télescope « intelligent » Vespera II

Si quelques irréductibles adhérents restent fidèles aux instruments d’observation avec vision en aval de l’oculaire, bon nombre se laissent attirer par les performances et la facilité d’emploi des télescopes « intelligents ». Après avoir testé le Seestar S50 de chez ZWO en avril 2024, nous vous présentons pour le mois d’octobre 2024, le télescope « Vespera II » conçu et fabriqué par la société française Vaonis.
Comme le Seestar S50, le Vespera II est un réfracteur apochromatique d’ouverture 50 mm et de distance focale 250 mm. Le Seestar possède un réflecteur triplet avec un élément de verre à très faible dispersion. Le Vaonis Vespera II est équipé d’un quadruplet apochromatique avec un élément en verre à faible dispersion FPL-52 de haute qualité. Les deux instruments sont conçus pour fournir des images excellentes et colorées du ciel nocturne.
La première grande différence entre les deux télescopes se situe au niveau du capteur de la caméra. Seestar S50 est doté d’un capteur Sony IMX462 de 2 mégapixels (1080-1920), tandis que le Vaonis Vespera dispose d’un capteur Sony IMX585 de 8,83 mégapixels (3840 x 2160) plus grand, plus récent et plus performant. La taille des pixels est identique : 2,9 micromètres.
La seconde différence notable réside dans la capture de mosaïque en temps réel. La société Vaonis est la première à équiper son télescope d’un mode mosaïque intégré entièrement automatique. Son champ de vision peut être augmenté jusqu’à quasiment deux fois en hauteur et en largeur pour atteindre 4.3° x 2.4° ! Comme nous le verrons plus loin, la Galaxie d’Andromède est entièrement capturée en ajustant le cadrage et l’orientation avec les doigts sur l’écran. Vespera II compose alors automatiquement l’image sans aucune intervention supplémentaire. Le processus d’empilement se fait en temps réel, avec l’emploi du procédé « dithering » qui améliore considérablement la qualité des images en annulant les pixels chauds et en corrigeant les motifs de bruit.

Les deux télescopes sont pilotés par WiFi avec un smartphone via l’application APP de AWO pour le Seestar S50, et l’application APP de Singularité pour le Vespera II. L’observation peut se faire sur l’écran du smartphone ou mieux, sur celui, plus grand, d’une tablette.

Après cette brève comparaison entre ces deux télescopes déjà bien répandus chez les amateurs astrophotographes, examinons quelques images du ciel nocturne obtenues avec le Vespera II. Pour être complet, il faudrait aussi tester ce télescope sur le Soleil, la Lune, et les planètes. Ce sera pour une prochaine fois, mais on peut remarquer de suite que la distance focale courte de 250 mm n’est pas la mieux adaptée à ce genre d’observation !

La première image captée est la nébuleuse NGC 7000 ou North America. Cette nébuleuse plaît à son auteur Michel Tharaud, et pourra être comparée à celle déjà obtenue en vision assistée par Pierre Drummel avec une lunette autoguidée Skywatcher Esprit 120 ED, munie d’un réducteur de focale X0.7, donnant une focale résultante de 588 mm, et un boitier d’acquisition ASIAIR Plus en mode “live”, qui permet l’empilement en temps réel des photos après recentrage automatique, publiée en décembre 2023.

Cette première image a été obtenue en 40 minutes d’enregistrement par l’empilement automatique de 240 poses de 10 secondes. Une petite retouche dans le logiciel DPP de Canon est venu augmenter légèrement l’éclat de la nébuleuse. Le résultat est vraiment bluffant pour un temps de pose aussi court ! Les contours de l’Amérique du Nord apparaissent nettement.
Ci-dessous, un filtre anti-poussière Photoshop a été appliqué pour diminuer le nombre d’étoiles visibles. L’auteur de l’image préfère… On obtient une image flatteuse, avec de belles nuances, mais d’une teinte rouge assez uniforme, alors que d’autres traitements manuels, sans doute plus sophistiqués que celui contenu dans le Vespera II, font apparaître une plus grande richesse de couleurs, voir cette publication par exemple.

La deuxième image présentée est celle  d’un amas globulaire, le plus célèbre de l’hémisphère nord : le grand Amas d’Hercule ou M13, dans la constellation éponyme. Elle a été obtenue avec un empilement de 30 poses de 10 secondes, correspondant à un temps de pose global de 5 minutes. Une retouche cosmétique a été apportée via le logiciel DPP Canon. Les étoiles du cœur de l’amas sont un peu empâtées, alors que celles de la périphérie sont bien définies, certaines présentant une légère teinte ocre comparable à celle d’autres enregistrements plus posés, comme celui de cette publication.
Là encore, on obtient, en 5 minutes, une image flatteuse, bien contrastée, peu bruitée, fidèle aux représentations qu’on peut admirer dans les médias actuels. C’est évidemment une technique très commode et très appréciée des visiteurs lors d’une observation publique qui voient l’image s’améliorer progressivement sous leurs yeux en temps réel !
La troisième image retenue est aussi une grande classique, à savoir la Galaxie D’Andromède ou M31. Cette fois, compte-tenu du grand champ à capter, c’est une mosaïque en temps réel que Michel a commandé à son Vespera II. Elle a été obtenue par l’accumulation de 240 poses de 10 secondes, soit un temps de pose global de 40 minutes. Retouchée facilement, elle aussi, avec le logiciel Canon DPP pour rehausser le contraste et éliminer une légère dominante sépia. Là aussi, le résultat est étonnant après un temps de pose aussi court : étoiles bien définies, bras spiraux nettement dessinés, fond de ciel uniformément noir, cœur à la limite de la surexposition, traces d’assemblage invisibles. Le public est à nouveau conquis !

Conclusion :
Il apparaît évident que ce type de réfracteurs « intelligents, comme le Vespera II, est appelé à connaître un engouement certain. Grâce à sa facilité de mise en œuvre et à la qualité des images obtenues en temps réel, même en grand champ, le Vespera II devrait séduire bon nombre d’associations qui pratiquent des observations grand public. Cet instrument vient en complément des lunettes et télescopes classiques fournissant des images, souvent Noir et Blanc, qu’on observe derrière l’oculaire.
A mon avis, il est fort probable que l’amateur exigeant continuera à préférer les observations en aval de l’oculaire ainsi que les photos prises dans cette configuration. Grâce à des temps de pose infiniment plus longs, à un choix de focales plus grand, aux infinies possibilités des logiciels de traitement, les photos d’amateurs passionnés auront toujours un attrait, à la fois esthétique et scientifique, que les instruments intelligents ne peuvent fournir actuellement….
Mais attendons quelques années : les constructeurs ne devraient pas en rester là. On devrait voir apparaître des instruments avec des focales plus longues, des logiciels de traitement encore plus performants, et des procédés plus pratiques d’extraction des images originelles en vue d’un traitement informatique postérieur plus sophistiqué.
Wait and see !




L’image du mois de septembre 2013 : le Grand Amas d’Hercule M13

M13hrbPour ce mois de rentrée 2013, voici l’image du Grand Amas d’Hercule ou Messier 13 que l’on peut admirer actuellement au zénith en première partie de nuit.
Cette image résulte d’une pose unique destinée à contrôler les performances d’un système d’autoguidage autonome (sans ordinateur portable).
Elle a été obtenue par Denis Lefranc, le 15 août 2013 à Verneuil sur Vienne, avec un APN Pentax K5 réglé sur 200 ISO au foyer d’une lunette semi-apochromatique M42Optic 102/714 autoguidée. Celui-ci était assuré par le système autonome LACERTA M-GEN monté sur une lunette guide 70/420. Le temps de pose de cette image unique est de 10 minutes. Son traitement a été intégralement réalisé sous Photoshop.
Cliquer sur l’image pour l’observer en grand format.

Le Grand Amas d’Hercule :
Découvert par Edmond Halley en 1714, il fut classé en 1764 par Charles Messier au numéro 13 de son catalogue des « non-comètes » [1]. Avec son télescope de Newton de 7 pieds de focale (1,85 m), et un grossissement de 60, ce dernier déclara : « cet objet est rond, beau brillant et ne contient aucune étoile« . Ce n’est qu’en 1783 que William Herschel le résolut aisément en un amas d’étoiles rapprochées grâce à son télescope de 7 pieds également [2].

C’est souvent une des premières cibles des astrophotographes amateurs. Facile à trouver aux deux tiers supérieurs de la ligne séparant les deux étoiles du côté droit du trapèze d’Hercule (identifiable entre la Lyre et la Couronne Boréale), il nous apparaît sous la forme d’un agglomérat d’étoiles très rapprochées plus ou moins détaillé selon la puissance de l’instrument utilisé. Avec une magnitude apparente de 5.8 et un diamètre angulaire de 20 minutes d’arc (presque celui de la Pleine Lune), il se laisse deviner à l’œil nu sous un ciel exempt de pollution lumineuse, en absence de Lune. Il est composé de plus 300 000 étoiles, vieilles pour la plupart, puisque son âge est estimé entre 12 et 14 milliards d’années-lumière. Il est donc apparu dans la toute jeune histoire de l’Univers. Cependant, il a été découvert de nombreuses étoiles jeunes dévoilées par leur vitesse angulaire (retardataires, de couleur bleue, bien visibles ici sur la photo présentée). Ce fait est inhabituel pour un amas aussi âgé… Les astrophysiciens pensent que ces étoiles ne seraient pas nées à l’intérieur de l’amas, mais capturées par ce dernier [3,4,5].

Le cœur de l’amas regroupe environ 250 étoiles par cube de 4 années-lumière de côté. A titre de comparaison, Proxima du Centaure, l’étoile la plus proche de notre Soleil se trouve à 4 années-lumière, mais elle est la seule à cette distance. Si notre Terre se trouvait au centre de cet amas, on ne connaîtrait pas la nuit [6].

L’amas est situé à 25 000 années-lumière de nous environ, en limite externe de la Voie Lactée avec une tendance à en sortir par la tranche. Comme autres objets, classés par ordre de distances croissantes, on trouve [1] :
– au dessus de l’amas, à 1380 années-lumière : l’étoile HIP 81848 de magnitude : 6,85.
– à gauche de l’amas, à 385 années-lumière : l’étoile HIP 81673 de magnitude : 7,25.
– à droite, à 46 millions d’années-lumière : la galaxie spirale NGC 6207 de magnitude 12.6, découverte par William Herschel en 1787.
Il est intéressant de noter que c’est autour de la magnitude 13 que se situe la limite d’enregistrement offert par le matériel ci-dessus en pose unique à 200 ISO.

Le système d’autoguidage autonome LACERTA M-GEN :
Le système d’autoguidage utilisé ici permet de s’affranchir de l’utilisation d’un ordinateur portable. Assez peu connu en France, il semble très apprécié en Allemagne et en Autriche. Le dispositif se compose d’une caméra équipée d’un capteur CCD Sony 3,6 x 2,7 mm et d’une raquette de commande avec écran de contrôle permettant de visualiser le champ filmé et un clavier de commandes des paramètres nécessaires à l’autoguidage. Alimenté par une batterie de 12 Volts, ce système est relié d’une part à la lunette-guide (ou à un diviseur optique) via un filetage standard T2, d’autre part à la monture via un câble RJ 12. Une fois l’étoile guide choisie (ici une quelconque dans le champ), il faut afficher les paramètres de guidage et laisser le système travailler. Pour son premier test avec les paramètres standard, Denis a réussi un autoguidage de plus de 10 minutes sans difficulté majeure. D’autres fonctions, telles que : vitesses de prise de vue, de rafraîchissement, de correction, tolérance, auto-calibration, micro-décalage (dithering)… restent cependant à approfondir pour tirer le meilleur parti de cet instrument qui, d’après la notice, promet des autoguidages avec des étoiles de magnitude 10. Affaire à suivre…

Le traitement numérique :
L’enregistrement brut issu de l’APN Pentax au format DNG et l’image finale traitée sont donnés ci-dessous à la suite l’une de l’autre afin de permettre la comparaison.

A noter que l’image brute peut constituer une réponse satisfaisante à donner aux participants des soirées d’observations publiques qui s’étonnent de ne pas distinguer beaucoup de couleurs à l’oculaire….! En leur présentant sur un écran de PC portable une photo prise devant eux en pose longue, on satisfait leur curiosité légitime…, au détriment de la perte d’acuité visuelle gênant toute observation ultérieure à l’oculaire dans les dix minutes suivantes.

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Le format DNG est compatible avec le logiciel Iris, mais ici, comme il n’y a qu’une seule image, Denis a choisi de la traiter intégralement avec Photoshop et ses plug-ins, à la manière d’une photographie classique diurne.
Le fichier est d’abord ouvert dans Photoshop Camera Raw qui propose les premiers traitements sur la totalité de l’image tels que : optimisation de l’exposition, des niveaux, de la clarté, de la saturation, du contraste…. Camera Raw présente en outre deux fonctions intéressantes : l’ajustement a posteriori de la température de couleurs et la réduction significative des aberrations chromatiques. La première fonction permet de jouer sur la tonalité générale de l’image en corrigeant les dominantes colorées du fond de ciel et des étoiles. La deuxième apporte une atténuation des halos colorés (visibles ici sur l’image brute agrandie) entourant les étoiles les plus brillantes.

Sous Photoshop, aucun traitement du bruit n’a été employé ici vu le très faible niveau de bruit engendré par l’APN Pentax à la sensibilité de 200 ISO.

L’image a été accentuée avec « Pro Sharpener », un plugin d’accentuation très puissant et non bruiteux qui renforce les détails des surfaces ou des contours, de manière globale ou sélective.

Le rehaussement local de la luminosité, de la saturation (ici pour les étoiles de l’amas), des ombres et aussi des « structures » (intéressant pour les nuances dans les nébuleuses), et ce sans apport de bruit supplémentaire, a été réalisé avec le plugin Viveza.

On termine enfin avec les propres fonctionnalités de Photoshop pour une nouvelle optimisation des niveaux et courbes diverses..

Comme on peut le constater, c’est une méthode de traitement très différente de celles qu’on rencontre habituellement en astrophotographie. Si, comme cette dernière, elle permet une approche séquentielle, elle peut être perçue comme plus intuitive. Il n’en reste pas moins que seule l’accumulation de poses, en vue d’atteindre une durée totale d’exposition significative, permettra de faire pleinement ressortir les détails les plus fins.

Webographie :
[1] http://www.ptobservatory.com/?m=201307
[2]
http://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=12&ved=0CDgQFjABOAo&url=http%3A%2F%2Fwww.astrosurf.com%2Fquasar95%2Fexposes%2Fconstellation_hercule.ppt&ei=2PAhUpaGG-q60wXD0oGQDQ&usg=AFQjCNEfnuDADVAxLRdsK2Roqv8pTM3TfA&bvm=bv.51495398,d.d2k
[3]
http://fr.wikipedia.org/wiki/Amas_d%27Hercule

[4] http://www.cidehom.com/apod.php?_date=000301
[5] http://www.astropolis.fr/catalogue-Messier/articles/M13/astronomie-messier-M13.html
[6]
http://dpelletier.ep.profweb.qc.ca/AstronomieCompl/APOD/ThemeApod/Amas_glo_2.html

Rédaction : Michel Vampouille.
Relecture et correction : Denis Lefranc




L’image du mois de juillet 2009 : le Grand Amas d’Hercule

Pour ce mois de juillet 2009, c’est le Grand Amas d’Hercule (ou Messier 13) que nous avons choisi de publier. Situé dans la constellation d’Hercule, entre les étoiles « η Her » et « ζ Her », il est très facilement localisable et visible à l’œil nu dans un ciel noir non pollué (magnitude : 5,9).
Cliquer sur l’image pour l’observer en grand format.
Halo lunaireLa photographie ci-dessus a été prise par Jean Pierre Debet avec une lunette ORION 80 ED autoguidée et équipée d’un capteur CCD ATIK 16 HR. Elle résulte de l’addition sous IRIS de 4 enregistrements (Luminance : 20 poses de 3 mn, Rouge : 9 poses de 3 mn, Vert : 7 poses de 3 mn, Bleu : 8 poses de 3 mn) totalisant un temps de pose de 2h 12 mn.

Composé de 500 à 800 000 étoiles, cet amas globulaire est un des plus vieux qu’il nous soit permis d’observer. Son âge est estimé entre 12 et 14 milliards d’années, c’est à dire à peu près l’âge de l’Univers.

Éloigné de 25 000 années-lumière, il se situe aux confins de notre galaxie.

En 1974, Messier 13 a été choisi comme cible pour l’envoi d’un message destiné à une éventuelle civilisation extraterrestre. Il contenait entre autre les chiffres, les numéros atomiques des corps les plus répandus, des données sur l’ADN, la forme et la taille d’un être humain terrestre, le nombre d’habitants sur Terre, notre position dans le système solaire…. Il faudra 25 000 ans pour que ce message arrive à destination et autant pour qu’il nous revienne si une quelconque civilisation se manifeste…!

Rédaction : Michel Vampouille