L’image du mois de novembre : les Dentelles du Cygne en Vision Assistée

Pour le mois de novembre 2023, nous vous présentons quatre photographies des Dentelles du Cygne réalisées selon quatre techniques différentes : une en LRVB classique, deux en bandes spectrales étroites, mais avec des restitutions différentes, et une en Vision Assistée : technique récente où l’image apparaît progressivement sur une tablette au fil des photos unitaires empilées automatiquement via un logiciel ad’hoc.
Pour les astrophotographes, les Dentelles du Cygne constituent une cible d’été idéale : facile à situer, haute dans le ciel, très étendue, très nuancée avec beaucoup de fines draperies colorées.
Les renseignements astronomiques sur ce rémanent de supernova ont déjà été donnés dans deux précédents articles. Nous y renvoyons le lecteur intéressé :
https://saplimoges.fr/limage-du-mois-de-mars-2010-les-dentelles-du-cygne/
https://saplimoges.fr/limage-du-mois-de-janvier-2022-la-petite-dentelle-du-cygne-ngc-6960/

Commençons de suite par la première version, technique de base en LRVB :
La Grande Dentelle du Cygne, NGC 6992 ou la Chauve Souris :
Cette image a été réalisée par Pierre Drumel, le 28 août 2022, avec une lunette autoguidée Skywatcher Esprit 120 ED, munie d’un réducteur de focale X0.7, donnant une focale résultante de 588 mm (F/D = 5) et suivie d’une caméra couleur ZWO ASI 2600 MC refroidie à -10°C. La monture Skywatcher AZ EQ6, est pilotée par un boîtier ZWO ASIAIR Plus en mode « Autorun« , avec un gain de 100 et des poses unitaires de 5 minutes. Traitement : logiciel Pixinsight.

Grande Dentelle NGC 6992 : Technique LRVB, 2H15 de pose, restitution en vraies couleurs.

Deuxième version : en 2 bandes spectrales étroites de 3 nm, Hα et OIII, avec restitution en vraies couleurs :
L’image du rémanent de supernova Sh2-103 (catalogue Sharpless) en son entier a été réalisée le 5 août 2023, par Michaël Belleville, avec une lunette autoguidée Skywatcher Esprit 80 ED, de focale 400 mm, suivie d’un filtre Optolong L-ultimate qui réduit drastiquement les effets de la pollution lumineuse et ne laisse passer que deux bandes spectrales étroites de 3 nm, centrées sur les longueurs d’ondes d’émission des nébuleuses Hα (656 nm) et OIII (496 et 500 nm). Le capteur est ici un APN Canon EOS 6D défiltré partiellement pour mieux récupérer les informations de la bande « infrarouge proche » Hα.
Temps de pose global : 18 X 10 min = 3Heures, à 3200 ISO.
Le traitement numérique « en vraies couleurs » est assuré par les logiciels Siril, Lightroom et PHD Guiding 2.
La Grande Dentelle NGC 6992 : à gauche ; le Triangle de Pickering NGC 6979 : un peu à droite, en haut ; la Petite Dentelle NGC 6960 (le Balai de Sorcière) : à droite. Deux bandes spectrales étroites, Hα et OIII, restitution en vraies couleurs via un APN.

Troisième version : en 2 bandes spectrales étroites de 3 nm, Hα et OIII, mais restitution en fausses couleurs :
Cette photo a été enregistrée les 10 et 11 août 2021 en milieu urbain par Julien Denis au moyen d’une lunette Sky Watcher Esprit 100 ED => focale 550 mm, équipée d’une caméra monochrome ASI 1600 MM pro et de sa roue à filtres contenant seulement 2 filtres à bande étroite (3 nm) Hα (19 X 10 minutes) et OIII  (19 X 10 minutes). Le temps de pose global est donc de 6H20.
Le prétraitement est assuré par le logiciel Siril, mais à la différence de la restitution 2 ci-dessus, celle-ci est réalisée en « fausses couleurs » selon la palette « HOO » de Pixinsight qui attribue les trois couleurs de base :
– Rouge à l’enregistrement Hα (vraie couleur : 656 nm),
– Verte à l’enregistrement OIII (vraie couleur : 500 et 496 nm),
– Bleue à l’enregistrement OIII (fausse couleur : 500 et 496 nm).
Cette palette restitue correctement les zones d’Hydrogène de couleur rouge qui contrastent alors nettement avec les zones d’Oxygène ionisé traduites en couleur bleue.

Petite Dentelle NGC 6960 : deux bandes spectrales étroites, Hα et OIII, restitution en fausses couleurs via la palette HOO de Pixinsight.

Quatrième version: la Petite Dentelle en LRVB, mais Vision Assistée :
Petite Dentelle du Cygne en Vision Assistée : temps de pose 11 minutes seulement, résultat  immédiat (bluffant) visible par le public sur le terrain !!!

Cette dernière photo a été obtenue « en direct » sur le terrain par Pierre Drumel le 6 octobre 2023 avec le même matériel que pour la photo de la première version : F = 588 mm, autoguidage, caméra couleur ZWO ASI 2600 MC, même boitier d’acquisition ASIAIR Plus, mais en mode « live » qui permet l’empilement en temps réel des photos après recentrage automatique avec les  consignes et paramètres suivants :
– caméra : gain passé de 100 à 200, et enregistrement en format 12 bits au lieu de 14 => gain en luminosité.
– observation sur tablette, il n’y a plus d’oculaire.
– temps de pose unitaires : 30 secondes au lieu des 3 ou 5 minutes habituelles.
– nombre de photos à empiler via le boitier : 10 au minimum, et au-delà contrôle visuel sur la tablette pour juger de l’instant d’arrêt. Pour la Petite Dentelle présentée ici : 22 photos de 30 secondes, soit 11 minutes de pose globale.
– Histogramme automatique assuré par le boitier.
– Injection préalable dans le boitier des Offsets (50), Darks (15) et Flats (20) faits sur place. Le boitier calcule automatiquement les ODF maîtres.
– Sortie et observation des images finales sur la tablette au format FITS.
– Cette nuit-là : 11 cibles ont été visées en 1H30 environ !!!!! Sans tenir compte du temps passé pour les ODF.
– Post-traitement en salle, via les logiciels Pixinsight (traitement non-linéaire) et Corel-Paintshop (format PNG pour publication).

Conclusions :
– Résultats bluffants de la Vision Assistée, au-delà de toute espérance, compte-tenu du temps de pose de 11 minutes,
– Résultats magiques et sensationnels pour les observations publiques !!! Enfin des photos représentatives et en couleurs sur le terrain !!!
– Inconvénients de la Vision Assistée pour les observateurs contemplatifs  : perte du plaisir de la recherche de la cible et de son observation à l’oculaire !
– Le mode d’acquisition des images en bandes étroites diminue nettement le nombre d’étoiles visibles.
– Plus toutes les remarques que vous voudrez bien rédiger en commentaires !!!!

 

 

 

 

 

 

 

 




L’image du mois de janvier 2022 : la Petite Dentelle du Cygne, NGC 6960

Nous allons commencer l’année 2022 avec une image très prisée des astrophotograhes : la Petite Dentelle du Cygne (ou du Voile) rangée dans le New General Catalog sous le numéro 6960.

Cliquer sur l’image pour la visualiser en résolution supérieure.

Cette photo a été enregistrée les 10 et 11 août 2021 en milieu urbain par Julien Denis au moyen d’une lunette Sky Watcher Esprit 100 ED, fixée sur une monture Sky Watcher EQ-6 R Pro, équipée d’une caméra monochrome ASI1600 MM pro, de sa roue à filtres et de seulement 2 filtres à bande étroite : Hα (19 X 10 minutes) et OIII (19 X 10 minutes), soit un temps d’exposition global de 6H20. La restitution a été conduite avec les logiciels Siril pour le prétraitement, et Pixinsight pour le traitement final, selon la palette « HOO » qui attribue les 3 couleurs :
– Rouge à l’enregistrement Hα (vraie couleur),
– Verte à l’enregistrement OIII (fausse couleur),
– Bleue à l’enregistrement OIII (fausse couleur).
Cette palette restitue correctement les zones d’Hydrogène de couleur rouge qui contrastent alors nettement avec les zones d’Oxygène traduites en couleur bleue.

La Petite Dentelle du Cygne (50′ d’extension linéaire) fait partie d’un ensemble de trois nébuleuses appelé « les Dentelles du Cygne » et récemment répertoriées sous le numéro : SNR G074.0-08. Comprenant la « Petite » et la « Grande Dentelle du Cygne », ainsi que le « Triangle de Pickering », cet ensemble très vaste s’étend sur 10 degrés carrés environ (4° X 2,5°) et se situe à 1 440 années-lumière de la Terre, dans l’une des ailes de la constellation du Cygne, ainsi que le montre la carte Stellarium ci-dessous :

Il constitue « un rémanent de supernova » : terme particulier pour désigner l’énorme bulle de matière éjectée dans l’espace interstellaire lors de l’explosion d’une étoile massive en fin de vie. A ce stade, les étoiles massives cessent de générer de l’énergie car tout leur combustible thermonucléaire a été consommé. L’étoile s’effondre alors sur elle-même sous l’effet de sa propre gravité.  En-deça d’un certain seuil, elle rebondit sur elle-même et explose violemment en produisant :
– une lumière très intense qui dure quelques semaines : la supernova,
– d’énormes masses de gaz qui se répandent dans l’espace : le rémanent.
Cet événement se serait produit entre 5 et 8 000 ans. Il est donc possible que les civilisations de la lointaine antiquité aient vu l’explosion avec une luminosité comparable à celle d’un croissant de Lune.
Au fil du temps, les masses de gaz se dispersent, s’étendent, s’effilochent et deviennent un vestige de supernova. Les différentes couleurs de l’image sont dues à la désexcitation des différents gaz contenus dans le rémanent : bleu pour l’oxygène et rouge pour l’hydrogène.
Aujourd’hui, les trois nébuleuses sont très peu lumineuses. Comme en photographie, leur observation visuelle est nettement améliorée avec l’emploi d’un filtre sélectif OIII à bande étroite. Un télescope de 400 mm avec un tel filtre donne des images remarquables.
L’étoile 52 Cygnus, de magnitude 4,2 qu’on voit au centre de la Petite Dentelle, bien pratique pour la repérer, est située à 206 années-lumière de nous : elle est donc complètement indépendante du rémanent.

Webographie :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Dentelles_du_Cygne
http://www.astrosurf.com/obscf/ARTICLES/DENTELLES/DENTELLES.html
 http://www.astrosurf.com/zodex/astrophoto/astrophoto2014/Dentelles-24AOU2014.html

 




L’image du mois de mars 2010 : les Dentelles du Cygne

Pour l’image du mois de mars, nous restons dans le ciel profond avec une fraction de la nébuleuse des Dentelles du Cygne appelée aussi la Nébuleuse du Voile ou encore NGC 6960.
Dentelle du CygneCliquer sur l’image pour l’observer en résolution supérieure.
Elle a été photographiée par Jean Pierre Debet à Saint Léonard de Noblat (87400) en août 2009, avec une lunette Skywatcher 80ED autoguidée et équipée d’une caméra CCD Atik 16 HR munie de sa roue à filtres.
Le temps de pose cumulé est de 3h 15min, avec 75 minutes pour le filtre Hα (largeur de bande : 6nm), 45 minutes pour le filtre rouge, 30 minutes pour le vert et 45 pour le bleu. L’addition des images a été réalisée avec IRIS et le traitement colorimétrique avec Photoshop selon les conseils de la leçon N°10 de Nicolas Outters parue dans Astronomie Magazine N°120 de février 2010.

Les Dentelles du Cygne constituent « un rémanent de supernova » : terme particulier pour désigner l’énorme bulle de matière éjectée dans l’espace interstellaire lors de l’explosion d’une étoile massive en fin de vie. A ce stade, les étoiles massives cessent de générer de l’énergie car tout le combustible thermonucléaire a été consommé. L’étoile s’effondre alors sur elle-même sous l’effet de sa propre gravité.  Au-delà d’un certain seuil, elle explose violemment en produisant une lumière très intense qui dure quelques semaines : la supernova, et en projetant d’énormes masses de gaz dans l’espace. Au fil du temps, ces masses se dispersent, s’étendent, s’effilochent et deviennent un vestige de supernova. Les différentes couleurs de l’image sont dues à la désexcitation des différents gaz contenus dans le rémanent : soufre (vert), oxygène (bleu) et hydrogène (rouge).

L’écheveau des filaments gazeux des Dentelles du Cygne a été identifié comme rémanent en 1950. Il se situe dans l’aile droite de la constellation du Cygne, à « proximité » de l’étoile 52 Cygnus bien visible sur la photo. On estime aujourd’hui que les Dentelles du Cygne se situent à seulement 1 440 années-lumière de la Terre et seraient en expansion depuis 5 à 10 000 ans. Il est donc possible que les civilisations de la lointaine antiquité aient vu l’explosion avec une luminosité comparable à celle d’un croissant de Lune. L’étoile 52 Cygnus, à 206 années-lumière de nous, est complètement indépendante du rémanent.

Bibliographie :
http ://fr.wikipedia.org/wiki/Dentelles_du_Cygne
http://apod.nasa.gov/apod/ap070110.html

Rédaction : Michel Vampouille