L’image du mois de février 2015 : Cercle parhélique et Paranthélie

Pour le mois de février 2015, voici deux nouveaux phénomènes atmosphériques dus à des cristaux de glace plats hexagonaux illuminés par les rayons solaires. Il s’agit du « cercle parhélique » (à ne pas confondre avec le halo parhélique à 22°) accompagné d’une « paranthélie ».

parantheliehrCliquer sur l’image pour l’observer en résolution supérieure.
Le « cercle parhélique », c’est une ligne blanche horizontale qui part du Soleil et qui fait un tour complet en restant à la même hauteur angulaire que le Soleil. Ici, c’est l’objectif grand angulaire de l’appareil photographique et la direction inclinée de prise de vue qui transforment la ligne horizontale en une ligne courbe s’élevant aux deux extrémités. Il est constitué de millions de cristaux de glace plats, hexagonaux et orientés qui réfléchissent la lumière du Soleil sur leurs faces verticales. L’éclat du cercle parhélique dépend de l’altitude du Soleil et de l’épaisseur des cristaux.

Quant à la « paranthélie », c’est la tache lumineuse blanche non colorée située ici au centre de l’image et traversée par le cercle parhélique. Cette tache présente la particularité d’être toujours située à 120° du Soleil en azimut. Il peut donc y en avoir deux, une chaque côté du Soleil. Elles résultent des rayons lumineux provenant du Soleil et réfléchis 2 fois sur les faces internes des cristaux de glace hexagonaux.
Ces deux phénomènes atmosphériques sont relativement rares : on en compte une moyenne de 4 chaque année [1-2].

Cette photographie a été prise en Vendée le 11 juin 2011 à 11H14 par David Hémon, fils de Serge, avec un appareil Sony Cyber-Shot.

cristauxphenomenesrares

Parmi les nombreuses formes de glace que peuvent contenir les nuages d’altitude, voir schéma ci-contre [3], ce sont les cristaux hexagonaux « galettes » (notés 1 et 2) qui interviennent dans la formation du cercle parhélique et des paranthélies. Quant aux cristaux « colonnes », ils sont responsables, entre autres, des halos parhéliques et de l’arc circumzénithal qui ont déjà fait l’objet d’articles dans cette rubrique.

Les phénomènes lumineux présentés appartiennent à la classe des phénomènes peu fréquents (moins de 5 par an). Ces derniers sont recensés sur le schéma de droite.

Quand on observe des parhélies dans le ciel, il faut penser à regarder à 120° de chaque côté du Soleil. Si les conditions météo s’y prêtent, les paranthélies sont visibles.

Formation du Cercle Parhélique

Le Cercle Parhélique résulte de la réflexion des rayons lumineux provenant du Soleil sur une des faces externes verticales des cristaux de glace contenus dans les nuages d’altitude. Dès que l’œil de l’observateur reçoit un rayon réfléchi par un cristal de glace, il voit un point lumineux blanc s’inscrire dans le ciel dans la direction du cristal. S’il y a des millions de cristaux de glace répartis tout autour de l’observateur, la juxtaposition des points lumineux forme une ligne blanche continue faisant un tour complet à la même hauteur que celle du Soleil.

Pourquoi l’observateur voit-il une ligne à la même hauteur que celle du Soleil ?
Pour répondre à cette question, commençons par examiner le trajet d’un rayon lumineux réfléchi au niveau d’un cristal de glace.

reflexionLes grandes faces hexagonales du cristal sont horizontales. Le rayon solaire incident xI tombe en I sur une des faces verticales. La perpendiculaire In à la face et la direction xI du rayon incident définissent un plan particulier qui s’appelle le plan d’incidence. Les lois de Snell-Descartes sur la réflexion nous apprennent que le rayon réfléchi Iy est contenu dans ce plan d’incidence avec l’angle de réflexion yIn égal à l’angle d’incidence nIx. Pour un observateur, ce rayon réfléchi sur ce cristal particulier semblera provenir de la direction yz. Le rayon incident xI et son rayon réfléchi Iy, tous deux contenus dans le plan d’incidence, forment donc le même angle avec un plan horizontal.

Conclusion 1 : la direction d’observation yIz donnée par un rayon réfléchi par un cristal frappe le ciel en un point situé à la même hauteur angulaire que le Soleil.

cercleparheliqueExaminons maintenant l’influence de tous les cristaux de glace.
Supposons que le ciel soit rempli de millions de cristaux « galettes » tous horizontaux, mais avec leurs faces latérales orientées de manière quelconque.

La vue de dessus de cette configuration « naturelle » est représentée sur la figure de droite. Nous n’avons dessiné que 5 cristaux judicieusement placés, mais il faut imaginer qu’il y en partout tournés dans tous les sens.

Les rayons incidents xI1, xI2, xI3, xI4, et xI5 provenant du Soleil sont évidemment tous parallèles. Ils frappent les cristaux sur leurs faces latérales.

Parmi tous les rayons réfléchis dans tous les sens par les différentes faces de tous ces cristaux, il y en a toujours qui arrivent dans l’œil de l’observateur. Ainsi, le cristal 1, dessiné avec une orientation convenable, envoie un rayon réfléchi en I1 vers l’œil. L’œil « voit » alors un point dans le ciel dans la direction œil/I1. De même, le cristal 2, légèrement tourné par rapport au cristal 1, envoie un rayon réfléchi en I2 vers l’œil. L’œil voit alors un nouveau point dans la direction I2. Le même phénomène se reproduit pour les cristaux 3, 4 et 5. L’œil voit des points lumineux dans les directions œil/I3, œil/I4, œil/I5…

Comme les cristaux sont tout petits et qu’ils remplissent tout l’espace, l’ensemble des points lumineux vus par l’observateur forme une ligne horizontale continue dans le ciel dont on a déjà dit plus haut (conclusion 1) qu’elle était à la même hauteur angulaire que le Soleil : c’est le cercle parhélique.

Si les nuages de cristaux sont discontinus, alors le cercle parhélique s’arrête là où il n’y a plus de nuages, comme c’est le cas ici sur la droite de la photo.

Le faible coefficient de réflexion sur chacune des faces de glace, de l’ordre de 1 %, et la petitesse de toutes les surfaces réfléchissantes orientées dans les bonnes directions, expliquent la faible intensité du cercle parhélique.

Formation des Paranthélies à 120°

Les deux paranthélies proviennent de deux réflexions dans le cristal de glace sur deux de ses faces latérales consécutives.

Le schéma ci-dessous illustre le trajet des rayons lumineux conduisant à la paranthélie située à 120° à gauche de la direction du Soleil.

refractionUn des rayons solaires pénètre en M dans le cristal par sa face horizontale supérieure où il est réfracté vers l’intérieur. Ce rayon est ensuite réfléchi une première fois au point I sur une des faces latérales et une deuxième fois au point J, sur la face latérale adjacente. A partir du point J, il est dirigé vers le point N de la face horizontale inférieure sur laquelle il subit une réfraction qui le fait ressortir du cristal. Un observateur placé loin à droite sur le prolongement du rayon Ny verra à la fois, le rayon réfracté provenant du cristal et les rayons solaires directs venant de sa droite.

Il nous faut maintenant expliquer 2 points :

  1. Pourquoi le rayon sortant Ny pointe-t-il dans le ciel vers un point situé à la même hauteur angulaire que le Soleil ? Autrement dit, pourquoi la paranthélie est-elle située sur le cercle parhélique ?
  2. Pourquoi le rayon sortant est-il toujours orienté à 120° en azimut par rapport à la direction du Soleil ?

Pour répondre à la question 1, il faut revenir à la conclusion 1 donnée plus haut : les 3 rayons internes MI, IJ et JN appartiennent tous au même plan d’incidence défini par MI et la perpendiculaire en I à la face latérale verticale sur laquelle MI va se réfléchir. Autrement dit, la hauteur angulaire de ces 3 rayons par rapport à l’horizontale est la même. On peut donc affirmer que s’il n’y avait pas eu de réflexions aux points I et J (par exemple, avec une galette de grande surface), le rayon MN serait rectiligne. On se retrouve alors dans le cas classique du passage d’un rayon lumineux à travers une lame de glace à faces parallèles dont le schéma est représenté ci-dessous.

lameglaceUn rayon solaire xM frappe la face horizontale supérieure du cristal en faisant un angle d’incidence i avec la perpendiculaire en M à la face. Il est réfracté dans le plan d’incidence (celui de la page) selon la direction MN en faisant un angle de réfraction r conformément à la loi de Snell-Descartes :
sin i = n sin r, où n est l’indice de réfraction de la glace.

Ce rayon intérieur est ensuite réfracté en N par la face horizontale inférieure selon la loi :
n sin r’ = sin i’, avec r’ : angle d’incidence sur la face et i’ : angle de réfraction (ou d’émergence).
Finalement, le rayon lumineux ressort du cristal de glace selon la direction Ny.

Il est évident que les angles r et r’ sont égaux. On en déduit de suite que l’angle d’incidence i est égal à l’angle d’émergence i’. Par conséquent, les rayons incident xM et émergent Ny sont parallèles. Autrement dit, un observateur qui reçoit le rayon émergent Ny verra le Soleil à la même hauteur angulaire que s’il n’y avait pas de cristal de glace.

Ceci est aussi vrai sur le schéma de départ pour le trajet réel du rayon lumineux ayant subi deux réflexions internes dans le cristal.

paranthliedessusPour répondre à la question 2, il nous faut un nouveau schéma représentant un cristal de glace vu de dessus.

L’œil de l’observateur regarde à la fois les rayons solaires x/Œil provenant du Soleil, et ceux J/Œil résultant d’une double réflexion interne dans le cristal de glace. Compte-tenu des démonstrations précédentes, nous n’avons pas fait figurer les points M et N d’entrée et de sortie sur les faces horizontales qui n’ont aucun effet sur les directions des rayons lumineux quand on les regarde de dessus. Ce qu’il nous faut expliquer c’est pourquoi l’angle A entre les rayons directs et les rayons en provenance du cristal vaut toujours 120° et ceci quelle que soit son orientation.

On remarque :
– Angle réfléchi I2 = angle incident I1. L’angle I3, ayant pour complément I2, est égal à l’angle I4, car celui-ci a pour complément I1, égal à I2.
– De même : J1 = J2 et J3 = J4.
– Dans le triangle IDJ, l’angle D vaut 180° – (I3 + I4 + J3 =J4), ou encore, d’après les remarques ci-dessus, D = 180° – 2(I3 + J3).
– Dans le triangle CIJ, la somme des angles (I3 + J3) = 180° – C, avec C = 120°,  car angle entre 2 côtés adjacents d’un hexagone.
– Il vient donc : (I3 + J3) = 180° – 120 = 60°.
– En reportant ce résultat dans la ligne du dessus, on obtient : D = 180° – 2×60° = 60°.

– Et enfin, le résultat cherché : A = 180° – D = 180° – 60° = 120°, quel que soit l’angle d’incidence I1.

Conclusion : dans une direction à 120° des rayons solaires directs, l’observateur voit une tache blanche fixe qu’on appelle une paranthélie. En présence de nuages renfermant des cristaux de glace de forme « galette », une  tache symétrique existe aussi de l’autre côté.

Retour sur le cercle parhélique : en toute rigueur, il faut noter que les rayons réfléchis une seule fois sur une face interne contribuent aussi à la formation du cercle parhélique. Dans cette configuration, les rayons solaires pénètrent dans le cristal par la face horizontale supérieure où ils sont réfractés. Ils sont ensuite réfléchis par une seule des faces latérales internes, et ressortent après une nouvelle réfraction par la face horizontale inférieure. Contrairement aux deux paranthélies, les directions des rayons émergents sont quelconques, car cette fois, elles dépendent de l’angle d’incidence I1 et de l’orientation de la face réfléchissante.

Bonne chasse aux phénomènes atmosphériques « rares »…

Note du photographe : la petite trace blanche qu’on voit à gauche, au dessus de la paranthélie est celle d’un avion Airbus 380.

Bibliographie et Webographie :

[1] http://fr.wikipedia.org/wiki/Cercle_parh%C3%A9lique
[2] http://la.climatologie.free.fr/pheno-optique/optique2.htm#4
[3] http://www.atoptics.co.uk/halo/platcol.htm
[4] Häckl Hans : « Farbatlas Wetterphänomene », Ulmer, 1999.
[5] http://fr.wikipedia.org/wiki/Parh%C3%A9lie#mediaviewer/File:Halo_overview.svg

Rédaction : Michel Vampouille.




L’image du mois de juillet 2013 : arc circumzénithal

arcpfhrPour le mois de juillet 2013, voici l’image d’un arc circumzénithal : un phénomène atmosphérique parfois appelé « arc en ciel inversé » dû à des cristaux plats de glace illuminés par les rayons solaires. Cette photographie a été réalisée à Limoges le 05 mai 2013 à 19H 05min par Anthony Hémon, petit-fils de Serge, avec un APN Canon EOS 7D (objectif grand angulaire de 15 mm, ouverture : F/4.5, sensibilité : 320 ISO, temps de pose : 1/2000 sec). Cliquer sur l’image pour l’observer avec une résolution supérieure.

L’arc circumzénithal est un phénomène lumineux qui se forme dans les cristaux de glace plats et hexagonaux (appelés plaquettes) orientés horizontalement, présents dans les cirrus ou les trainées de condensation. Toujours courbé dans la direction opposée au Soleil, il ne dessine généralement qu’un quart de cercle centré au zénith. Contrairement à l’arc en ciel, ses couleurs très pures vont du bleu à l’intérieur au rouge à l’extérieur. L’arc circumzénithal ne peut se former que si la hauteur du Soleil ne dépasse pas 32,2° au-dessus de l’horizon. Toujours très haut dans le ciel, il est le plus brillant lorsque l’altitude solaire est comprise entre 20° et 25° [1][2].

arcgfhrL’image de la vignette donnait une idée de la taille du phénomène par référence à celle du nuage. Celle ci-dessus prise avec un objectif de focale 35 mm permet de mieux distinguer les couleurs de l’arc. Cliquer dessus pour l’observer avec une résolution supérieure.

1) Tracé des rayons lumineux dans un cristal de glace :
Dans les nuages d’altitude, les nuages contiennent souvent des cristaux de glace transparents dont la forme peut être assimilée à des cylindres à section hexagonale. Ces cylindres, plats ou épais, tombant vers le sol de manière ordonnée ou non, reçoivent les rayons du soleil, les réfléchissent et les réfractent dans de nombreuses directions qui dessinent dans le ciel une grande variété de motifs caractéristiques.
Dans le schéma ci-dessous expliquant la formation de l’arc circumzénithal, les rayons lumineux entrent par la face supérieure horizontale et sortent par une face latérale après avoir subi deux réfractions dans le prisme d’angle A = 90° formé par cette fraction du cristal de glace.

tracerayons1) Un rayon solaire frappe la face supérieure du cristal en I avec un angle d’incidence i, ou une altitude h = 90° – i.
2) Après une première réfraction en I sur la face horizontale, il se propage dans le cristal  avec une direction qui fait un angle r avec la normale à la face.
3) Le lien entre l’angle d’incidence i, l’angle de réfraction r et l’indice de réfraction n de la glace est donné par la relation de Descartes : sin i = n sinr.
4) Ce rayon vient ensuite frapper la face latérale verticale du cristal en J selon une direction qui fait un angle d’incidence r’ et dont la valeur est donnée par : r’ = 90° – r.
5) Il subit alors une 2ème réfraction en J sur cette face et sort du cristal selon une direction qui fait un angle d’émergence i’ avec la normale. Celui-ci est régi à nouveau par la loi de Descartes : n sin r’ = sin i’.
6) Enfin, ce rayon sortant sera vu par un observateur au sol sous un angle β avec la verticale qui est donné par : β = 90° – i’.

2) Indice de réfraction de la glace :
Parmi les nombreux astronomes et physiciens qui se sont intéressés aux figures provoquées dans le ciel par les cristaux de glace, on peut citer Auguste Bravais [3] qui a été le premier à mesurer l’indice de réfraction de ce matériau selon diverses longueurs d’onde avec une erreur absolue de 0,001. Les valeurs qu’il a trouvées sont données dans le tableau ci-dessous :

 rouge     orange      jaune      vert       bleu      violet
1,3070   1,3085,    1,3095   1,3115   1,3150   1,3170

Dans la suite, on prendra n = 1, 3115 comme indice moyen de réfraction de la glace.

3) Conditions d’existence de l’arc circumzénithal :
L’observateur au sol ne verra cet arc que si le rayon IJ frappant la face latérale du cristal en J parvient à sortir (selon l’angle i’). Or ceci n’est pas toujours le cas.
Selon la valeur numérique de l’angle d’incidence r’, il peut arriver que le rayon se propageant dans le cristal se réfléchisse sur la face latérale comme sur un miroir.
A partir de la relation donnée dans (5), on peut prévoir la condition de « réflexion totale » en J. Celle-ci est donnée par : n sin r’ > 1. Dans ce cas, i’ n’existe plus, car le sinus d’un angle ne peut être supérieur à l’unité.
Il y aura donc réflexion en J si : sin r’ > 1/n, soit r’ > 49,68°.
Et donc réfraction avec rayon sortant et formation de l’arc si : r’ < 49,68°.

De relation en relation, on remonte à la condition sur l’angle d’incidence i ou sur la hauteur h du Soleil.
(4) r = 90° – r’> 90 – 49,68 > 40,31°.
(3) sin i > 1,3115 sin 40,31 > 0,849, soit : i > 58,05°
et finalement : h < 90° – 58,05 < 31,95°.
On retrouve bien la valeur indiquée au début : existence d’un arc circumzénithal si la hauteur du Soleil ne dépasse pas 32° au-dessus de l’horizon.

4) Formation d’un arc de cercle centré sur le Zénith :

Formation Arc4.1) Explication : Jusqu’à présent, nous n’avons considéré que les rayons solaires traversant les cristaux plaquettes dans un plan vertical. Cette situation n’existe qu’avec des cristaux dont une des faces latérales verticales est perpendiculaire au « plan d’incidence » : plan (ici de l’écran) formé par le rayon incident et la perpendiculaire en I à la face supérieure. Or, il n’y a aucune raison physique pour que les cristaux contenus dans le nuage soient tous dans cette position. Ils sont orientés de manière aléatoire et peuvent prendre toutes les orientations possibles, tout en restant horizontaux.
Pour introduire cette notion supplémentaire dans notre raisonnement avec un cristal unique, il faut imaginer que le cristal qui nous sert de modèle tourne sur lui-même autour d’un axe vertical (donc orienté vers le zénith) centré sur ses faces horizontales. Dans ce cas, le phénomène de double réfraction sur les faces horizontale et verticale existe toujours, mais la direction du rayon émergent en J ne reste pas dans le plan d’incidence. Au niveau de la deuxième réfraction en J, le rayon émergent est incliné à la fois dans le sens haut-bas et dans le sens droite-gauche. Autrement dit, il sort de l’écran.
Le calcul est plus délicat, mais on peut quand même prévoir ce qu’il advient au rayon émergent en disant que la figure qu’il dessine dans un plan d’observation horizontal doit satisfaire la condition de symétrie qui a provoqué son changement de direction. Or, la seule figure géométrique qui satisfait la condition de symétrie due à une rotation axiale est un arc de cercle centré autour du même axe. Pour l’observateur situé au sol, un arc de cercle centré sur le zénith se dessinera dans le ciel, chaque point de cet arc correspondant à la position d’un cristal particulier bien orienté dirigeant vers lui son rayon émergent. Les autres cristaux du nuage réfractent aussi les rayons solaires, mais leurs rayons émergents ne pénétrant pas dans l’œil de l’observateur sont ignorés par lui.

4.2) Vérification de la position du centre de l’arc circumzénithal : pour fixer les idées, commençons par montrer les différentes figures dessinées dans le ciel par des cristaux de glace hexagonaux [4].

spherecelesteSelon la nature (plaquettes ou crayons) et la disposition (aléatoire ou ordonnée) des cristaux de glace, l’observateur placé au centre de la demi-sphère céleste peut voir :
– les parhélies (P) et les halos parhéliques à 22° et 46°,
– les arcs tangents supérieurs (ATS) et inférieurs (ATI),
– le cercle parhélique centré sur le Soleil,
– un pilier solaire,
– et bien sûr, l’arc circumzénithal, qui est une fraction d’un cercle (appelé par le joli nom « d’almi-cantarat ») contenu dans un plan parallèle au plan équatorial.
Tentons, à partir des photos présentées, de vérifier que le centre de ce cercle correspond bien au zénith du lieu.
Pour cela, nous avons besoin de comparer la valeur numérique de deux angles :
– d’une part, l’angle (appelé β = 90 – i’ au paragraphe 1) correspondant à l’inclinaison théorique du rayon sortant avec la verticale du lieu. Celui-ci se calcule de proche en proche avec les relations 1, 3, 4 et 5 déjà citées dans lesquelles on injecte la hauteur h = 19° 36′ du Soleil à Limoges, le 05 mai 2013 à 19H 05min donnée par le logiciel Stellarium convenablement initialisé, et l’indice de réfraction de la glace n = 1,3115 (paragraphe 2). La relation (1) donne l’angle d’incidence i, la relation (3) calcule l’angle de réfraction r, l’angle r’ s’obtient avec (4) : r’ = 90° – r, et la relation (5) conduit à l’angle d’émergence i’ qui, tous calculs faits, vaut : i’ = 65,85°. L’inclinaison calculée du rayon sortant avec la verticale du lieu vaut donc : β = 90 – 65,85 = 24,15°.
– d’autre part, l’angle qu’on va appeler γ et qui est celui sous lequel l’observateur situé au sol voit le rayon de l’arc circumzénithal. En pratique, celui-ci se détermine à partir de la 2ème photo présentée [voir annexe]. Tous calculs faits, on trouve : γ = 24,62°.
On constate que l’angle attendu β est pratiquement égal à l’angle mesuré γ.
Ceci signifie que la direction du centre de l’arc circumzénithal vue par l’observateur au sol coïncide avec la verticale du lieu.
Autrement dit, c’est bien un arc circumzénithal qu’Anthony Hémon a photographié !

5) Formation d’un arc coloré avec le violet-bleu au dessus du rouge :
Sur les photos, on constate la formation d’un arc coloré selon les teintes de l’arc-en-ciel distribuées à l’envers, c’est à dire avec le bleu à l’intérieur de la courbure et le rouge à l’extérieur.
Les différentes teintes sont dues au fait que l’indice de réfraction varie avec la longueur d’onde du rayonnement qui traverse le prisme à 90° formé par le cristal de glace.
Comme on l’a vu plus haut, l’indice vu par le rouge est plus faible que celui vu par le bleu ou le violet.

Au niveau de la première réflexion en I, la loi de la réfraction de Descartes (sin i = n sin r) permet de de dire que l’angle de réfraction pour le bleu est plus petit que celui pour le rouge.
Au niveau de la 2ème réfraction en J, la situation s’inverse pour l’angle r’ (= 90° – r) qui devient plus grand pour le bleu que pour le rouge.
La loi de Descartes appliquée en ce point (sin i’ = n sin r) nous montre alors que l’angle d’émergence i’ sera plus grand pour le bleu que pour le rouge.
Autrement dit, dans un prisme, le bleu est plus dévié que le rouge…, ainsi que le suggère le tracé des rayons lumineux sur le schéma ci-joint.

rayonoeilTous les cristaux a, b, c, d contenus dans le nuage (schéma ci-contre) réfractent la lumière, mais l’observateur ne « verra » que ceux : b et c, qui envoient des rayons lumineux en direction de ses yeux. Les cristaux a et d sont ignorés par lui… Il verra donc des cristaux de glace bleus (b) au dessus de cristaux colorés en rouge (c).

6) Conclusion : La fréquence des arcs circumzénithaux est de l’ordre de 13 par an en Europe. Ce n’est donc pas un phénomène très courant. S’il vous intéresse, levez les yeux vers le zénith quand il y a des cirrus dans le ciel. Le matin et le soir, quand le soleil est encore assez bas sur l’horizon, vous aurez peut-être la chance de l’observer. On dit que cet arc est le plus « pur » de tous les phénomènes atmosphériques, alors bonne chasse et bonne chance.

Annexe : calcul de l’angle γ :
On imprime la photo 2 sur une feuille de papier et on détermine de manière géométrique le centre de l’arc en traçant deux cordes et leurs médiatrices : le point de concours est le centre de l’arc. On détermine ensuite la dimension R du rayon sur le capteur. Ceci se fait facilement à partir de la taille du capteur (22,3 X 14,9 mm) dont un des côtés sert d’étalon. On trouve : R = 16,04 mm. Reste à déterminer l’angle γ. Un schéma optique du trajet des rayons lumineux à l’intérieur de l’appareil photo montre que l’angle γ est aussi l’angle sous lequel depuis le centre optique de l’objectif, on voit le rayon R sur le capteur. γ se calcule à partir de sa tangente : tan γ = R/F où F est la distance focale de l’objectif, ici 35 mm. Tous calculs faits, on trouve : γ = 24,62°.

Webographie et bibliographie :
[1] http://opticsaround.blogspot.fr/2012/10/arc-circumzenithal-circumzenithal-arc.html
[2] http://fr.wikipedia.org/wiki/Arc_circumz%C3%A9nithal
[3] Bravais A. Journal de l’Ecole Royale Polytechnique, 18, 1, 1947
[4] D. Lynch, W. Livingston, Aurores, mirages, éclipses, Dunod Editeur, p.159.

Rédaction : Michel Vampouille
Traitement d’image : Denis Lefranc