L’image du mois de janvier 2016 : un halo lunaire à 22° entourant une couronne lunaire

Halo lunaireNous débutons l’année 2016 avec l’image d’un double phénomène atmosphérique relativement rare, à savoir une couronne lunaire enfermée dans un halo à 22°, aussi appelé halo parasélénique.
Ces deux phénomènes ne résultent pas du même processus physique.
La couronne lunaire est due à la diffraction de “la lumière de la Lune” sur les fines gouttes d’eau contenues dans les Altostratus [note1], nuages de moyenne altitude (3 à 7 km).
Alors que le halo parasélénique provient d’une double réfraction de “la lumière de la Lune” dans des cristaux de glace de forme “galette hexagonale” présents dans les Cirrus [note 2] et Cirrostratus [note 3] qui sont des nuages de l’étage supérieur (5 à 11 km environ). Sa formation est identique à celle des halos parhéliques qu’on observe en plein jour autour du Soleil.
Cette image a été réalisée par Michel Vampouille le 21 décembre 2015 à 23H30 dans la direction sud du ciel de Landouge (banlieue ouest à 6 km de Limoges), avec un APN Canon EOS 40D muni d’un objectif Samyang 14mm (F/2.8, 800 ISO, 5 secondes sur pied photo).
Cliquer sur l’image pour l’observer en résolution supérieure.
On distingue alors nettement l’amas des Pléiades et quelques étoiles de la constellation du Taureau dont Aldébaran, la plus lumineuse.
La tache verdâtre à gauche de la Lune est un reflet sur l’une des lentilles de l’objectif.

INFORMATIONS SUR LE HALO LUNAIRE
Formation du halo lunaire à 22° :
Lorsque la haute atmosphère est calme, les galettes de glace s’alignent horizontalement et tombent lentement vers le sol. Dans chaque cristal, la lumière entre par une face latérale verticale et sort par une autre après une double réfraction sur chacune des faces : on observe alors deux “fausses Lunes” aussi appelées parasélènes (ou encore moondogs = chiens de Lune), à même hauteur que la vraie, et à 22° de chaque côté.
Cette configuration a déjà été décrite dans l’article du mois de juin 2015 pour le Soleil [1]. On y explique notamment pourquoi la déviation des rayons lumineux provoquée par la traversée d’un prisme de glace d’angle 60° se produit selon un angle de 22°.
Lorsque la haute atmosphère est agitée, les plaquettes de glace sont orientées de manière aléatoire dans tous les sens, il n’y a plus deux “fausses Lunes, mais une infinité qui se répartissent en un anneau circulaire à 22° autour la vraie. C’est le petit halo parasélénique de 22°. Quand on observe l’image dans une ambiance lumineuse atténuée, on remarque sans ambiguïté que le halo est coloré en rouge, en jaune orange, voire en bleu au fur et à mesure qu’on s’éloigne de la Lune. Cette coloration provient du phénomène de réfraction qui dépend de la longueur d’onde des rayons lumineux traversant les cristaux de glace. L’article de juin 2015 [1] explique aussi pourquoi le rouge est à l’intérieur du halo et le bleu à l’extérieur.

Mesure du rayon angulaire de l’anneau
pour s’assurer qu’il s’agit bien d’un halo lunaire. Le principe du calcul a déjà été décrit en janvier 2011 [2] et en juin 2015 [1]. Le schéma optique du dispositif est le suivant :
RayonangulairehaloL’objectif Samyang de l’APN est simplifié (de manière abusive) par une lentille mince de centre optique O et de distance focale f. Dans le viseur de l’APN réglé à l’infini, on cadre le halo au centre de l’image. L’image de ce centre se forme en H’ sur le capteur. L’image de l’anneau entoure le centre, un des points de cet anneau est noté P’. Le segment H’P’ sur le capteur représente l’image du rayon de l’anneau HP qu’on voit dans le ciel. Le rayon angulaire de cet anneau est donné par l’angle α qu’on va déterminer à partir de la mesure de H’P’ sur le capteur et de la distance focale f (a priori connue) de l’objectif par la relation : tan α = H’P’/f.
Le segment H’P’, mesuré sur l’image originale non retouchée (pour conserver les adresses des pixels) vaut : 1045 pixels X 5,71 µm (taille du pixel) = 5 967 µm = 5,967 mm.
La distance focale est déterminée par une manipulation annexe qu’on explicitera dans un prochain article. On trouve f = 14,53 mm (au lieu des 14 mm donnés par le constructeur).
On a donc tan α = 5,967/14,53 = 0,411, d’où on tire α = 22,29°.
Compte tenu des approximations faites sur l’objectif, cette valeur est très satisfaisante puisque le rayon angulaire du halo lunaire se situe autour de 22°.

Visibilité du halo lunaire
Le même soir, à la même heure, Frédéric Delloume, un animateur de notre association habitant la commune de Couzeix distante de 5 km au nord-est de Landouge, l’a observé, alors que Michel Tharaud, un autre animateur, affirme ne rien avoir remarqué à Aureil situé à 18 km à l’est.  D’où la question suivante : la visibilité d’un halo, liée à l’étendue des nuages qui en sont responsables, peut-elle se limiter à une étroite région ?
Pour essayer de répondre, déterminons le rayon réel HP du halo localisé dans les nuages, en supposant que ceux-ci sont situés à 10 km de nous dans la direction de prise de vue [voir note 2]. Sur le schéma ci dessus, on voit tout de suite que : HP = OH tan α = 10 x tan (22,29) = 4,1 km.
Ce qui signifie que les nuages de cirrus s’étendaient au moins sur 5 kilomètres autour de Landouge. Il est donc plausible qu’à 6 km de distance, ils soient aussi au dessus de Couzeix, mais qu’à 18 km de là, il n’y en n’avait plus.

Dictons et proverbes autour du halo lunaire [3] :

Les dictons se transmettent par voie orale de génération en génération. Ils permettaient, entre autres, de comprendre la nature et prédire l’avenir à partir d’observations météo ou de phénomènes astronomiques.  Dans cette dernière catégorie, deux astres font l’objet de la plupart d’entre-eux : le Soleil et la Lune. Voici les plus courants quand la Lune est entourée d’un halo :
– Lune cerclée, pluie assurée.
– Lune dans son halo prépare de l’eau.
– Lorsque la Lune est dans sa maison, il pleuvra bientôt (proverbe indien).
Tous semblent prédire que la pluie va tomber un ou deux jours après l’observation d’un halo lunaire. Dans la réalité, cette prédiction s’avère souvent fausse puisque les nuages responsables du halo ne sont annonciateurs de pluie que dans certaines circonstances [voir notes 2 et 3 ci-dessous].  Dans notre cas, il n’est pas tombé une seule goutte d’eau les jours suivants…

INFORMATION SUR LA COURONNE LUNAIRE [4]
Les couronnes sont des disques de lumière qu’on observe quand la Lune (ou le Soleil) brillent à travers les nuages. Il ne faut pas les classer avec les halos, car elles ne sont pas dues à la réfraction de la lumière par des cristaux de glace de haute altitude, mais à la diffraction – entraînant une déviation – de la lumière par les gouttes d’eau sphériques des nuages altostratus de moyenne altitude [note 1].
La taille des gouttes est la principale caractéristique physique qui agit sur l’aspect, la dimension et les différentes couleurs de la couronne.
Le diamètre des gouttes (entre 5 et 30 micromètres) agit sur celui de la couronne. Plus les gouttes sont petites, plus le diamètre du disque est grand.
La diffraction de la lumière par une multitude de gouttes d’eau est un phénomène chromatique. Autrement dit, l’angle de déviation des rayons lumineux dépend de leur couleur. On distinguera donc des anneaux colorés plus ou moins contrastés dans la couronne. Toutefois, ils ne présenteront jamais les brillantes couleurs de l’arc-en-ciel. Le bleu et le rouge sont les 2 couleurs prédominantes dans la diffraction. La lumière bleue apparaît à l’intérieur de la couronne, tandis que le rouge est à l’extérieur.
– Si les gouttes d’eau sont toutes identiques (de même diamètre), les anneaux seront concentriques, comme c’est le cas ici. Dans le cas contraire, ils seront déformés. Les altostratus sont les nuages qui créent les plus belles couronnes, car leurs gouttelettes sont de grosseur uniforme.
Halo lunaire accentuéLa distribution des autres couleurs, qu’on arrive à renforcer par saturation numérique (image cliquable ci- dessus) est assez difficile à distinguer et à interpréter. En effet, Il n’y a pas d’anneaux colorés bien délimités, mais plutôt un passage progressif d’une couleur à une autre. Quant à l’interprétation théorique, elle est décrite par des fonctions mathématiques complexes qui ne font apparaître aucun extremum caractéristique dans leurs profils. Les lecteurs intéressés pourront consulter la référence [5] pour approfondir cette question.
Couleurs saturées

On se bornera à donner ici l’ordre théorique d’apparition des couleurs [tiré de 5] en partant de la lumière blanche de la Lune (là où est écrit : Couleurs saturées) pour montrer à quel point il est difficile de trouver une concordance au-delà du premier anneau rouge. Lorsque celle-ci est plus évidente, on parvient à remonter à la taille des gouttes à partir du diamètre des différents anneaux colorés. C’est le travail des météorologues.
Pour terminer, nous donnons ci-dessous quelques informations sur les nuages rencontrés dans cet article.

altostratusNote 1 : les Altostratus [6]
Ils forment une couche ou une nappe nuageuse grisâtre ou bleuâtre qui couvre partiellement ou totalement le ciel en laissant légèrement voir le soleil ou la Lune. Ils se situent dans l’étage moyen entre 2 et 6 km. Avec une épaisseur moyenne de 2 km, leur sommet se situe généralement dans l’étage supérieur. Ils sont composés de gouttelettes d’eau parfois surfondues, de cristaux de glace ou de neige. Ils se trouvent généralement à l’avant de la partie active d’une perturbation et donc, sont à l’origine des chutes de pluie, de neige ou de granules de glace

 

 

 

 

cirrusNote 2 : les Cirrus [6]
Ces nuages situés à l’étage supérieur (entre 5 et 11 km) sont composés de cristaux de glace. Ils se présentent sous forme de filaments blancs, de bandes étroites, ressemblant à des mèches de cheveux. Ils ne sont pas associés à des précipitations, mais quand ils envahissent rapidement le ciel, ils peuvent être annonciateurs d’une tempête ou de l’approche d’un front chaud.

 

 

 

 

cirrostratusNote 3 : les Cirrostratus [6]
Ce sont des voiles nuageux élevés (entre 5 et 11 km), constitués de cristaux de glace et donnent généralement lieu à des phénomènes de halos. Transparents et blanchâtres, ils couvrent partiellement le ciel. Ils apparaissent à l’approche d’un front chaud à la suite des cirrus et ne sont pas associés aux précipitations.

 

 

 

 

 

Webographie :

[1] http://saplimoges.fr/limage-du-mois-de-juin-2015-un-parhelie/
[2] http://saplimoges.legtux.org/l-image-du-mois/115-limage-du-mois-de-janvier-2011….
[3] http://www.meteoservian.fr/dictons.php
[4] http://www.meteo.org/phenomen/couronne.htm
[5] http://www.philiplaven.com/p8c.html
[6] http://la.climatologie.free.fr/nuages/nuage1.htm#6

Rédaction : Michel Vampouille